Azarias Ruberwa: la facture du Rwanda au Rcd-Goma? Et le régime Kabila a déjà payé combien?»

L'Eveil (Kinshasa)

7 Mai 2003
Publié sur le web le 7 Mai 2003

K. Tshilunde
Kinshasa

Le Secrétaire général du Rcd et haut représentant de ce mouvement au Comité de suivi de l'accord, Me Azarias Ruberwa, a animé, le dimanche 04 mai 2003 au Salon Congo du Ghk, une conférence de presse. Compte tenu de son importance, nous le reprenons intégralement.

Au cours de celle-ci, il a été introduit par le Dr. Lola Kisanga, chef de département Communication, qui a présenté à la presse toute sa gratitude pour la couverture assurée de leur présence à Kinshasa avant de dire que le Rcd se donne le devoir d'indiquer le caractère respectueux de la liberté de presse, d'opinion et d'expression.

Il a présenté les autres membres de la délégation présents dans la salle, à savoir le général de division Jean-Pierre Ondekane (chargé des activités militaires); Balama Ogekolo (chef de département des Transports et communications); Crispin Kabasele Tshimanga (chef de département adjoint chargé des relations extérieures); Tharcisse Habarugira (Chef-adjoint du Département des transports); Justin Konzanga (Administration du territoire, Sécurité et Renseignements); Lt-Col. Guy (G2 à l'Etat-major); le Général Charles Bisengimana (Coordonnateur adjoint de la Police); Col. Obett (G5 à l'EMG); Col. Tabiri (commandant brigade); Col. Likongo (Conseiller militaire) et Théo Baruti (Chargé de la mobilisation).

Prenant, à son tour, la parole, Me Azarias Ruberwa a remercié les autorités de la ville pour avoir autorisé la conférence, et le chef de l'Etat pour l'accueil et la sécurité. Il a estimé que, pour lui, la mission est accomplie car, la présence de la délégation du Rcd à Kinshasa marque la fin de la guerre en Rdc, et, martèle-t-il, «je pèse mes mots».

Pour faire atterrir ce processus, il fallait braver les défis, les incertitudes et venir à Kinshasa; ce qui a bouleversé les données et les calculs. En une semaine de travail, avec les autres délégations, «nous venons de réaliser un travail de titan qui se résume à ce que la commission a désormais des structures, des sous-commissions et un secrétariat. Il affirme qu'avoir réalisé un tel travail (à 80-90%) autour du chef de l'Etat pendant une semaine relève de l'impossible, du «miracle».

Sur ce chapitre, le secrétaire général conclut: «je pense que nous avons fait l'essentiel; je pense que nous avons fait l'impossible, je pense que nous avons réalisé un miracle. Néanmoins, il existe quelques écueils, de goulots d'étranglement. Comme nous le disons souvent, il faut privilégier ce qui nous unit par rapport à ce qui nous divise».

A une question de savoir comment la mission peut-elle être accomplie à cause de la situation de guerre à l'Est.

Elle n'est pas parachevée et la paix n'est que théorique, Ruberwa le confirme: La mission est accomplie, mais elle n'est pas encore parachevée. Effectivement, il y a une situation tendue dans certaines localités de l'Est. Le samedi 3 mai, de 5 h à 17 h, il y a eu des combats à Uvira. A ma compréhension des choses, ce que, autant nous nous évertuons à aller de l'avant en prenant même des risques, autant il y a des personnes qui ne veulent pas qu'on aille de l'avant.

Nous sommes devant ce dilemme: l'élan de la paix s'arrête ou nous continuonsavec l'envol que nous avons pris et ceux-là vont suivre? Nous avons eu des appels de la population d'Uvira, et même de Goma, pour dire: arrêter, parce que ce n'est pas sérieux. Vous n'avez pas le même niveau d'engagement, c'est pas sincère. Je ne pense pas que des attaques de telle ou telle autre localité suffisent pour arrêter le processus. La question des Maï-Maï coïncide avec ma date de naissance, en 1964, même si, aujourd'hui, ils vous parlent de la théorie de résistance.

Et pourtant, le pays était unifié, avec une seule armée. Ce dont nous avons besoin, c'est mettre ensemble les institutions capables de régler les questions qui se posent à gauche et à droite. Nous espérons que ceux qui approvisionnent en arme et en munitions les forces négatives qui se battent à l'Est vont arrêter de le faire. Nous l'avons signifié à qui de droit et, notamment, au gouvernement ici qui n'a jamais su cacher les relations avec les Maï-Maï, ce qui justifie cet approvisionnement.

Maintenant que nous sommes tous au siège des institutions, il n'y a plus de raison de garder ce cordon ombilical qui apporte cet approvisionnement. Sinon, comment peut-on justifier un seul instant qu'un avion dépose encore des armes à Shabunda et à Minembwe pour combattre le Rcd? Pourtant, nous avons pris le risque de faire confiance à ce gouvernement, autant ce gouvernement doit prendre le risque de nous faire confiance et de ne plus travailler avec les forces qui perturbent les nôtres et la population.+

Concernant le souhait émis à Sun City de voir le vice-président de l'opposition venir de la famille politique proche du Rcd, Ruberwa répond: (.)

Ce n'est pas une question d'amour, mais d'équilibre et de stabilité des institutions jusqu'aux élections. Le partage du pouvoir a été fait et nous l'avons endossé quoique préjudiciés. Le Rcd contrôle huit provinces sur onze, totalement ou partiellement. Nous avons quasiment les 80% du Kasaï Oriental, à une quarantaine de kilomètres de Mbujimayi et à 60 de Kananga.

Vous savez que Pweto est à 400 km de Lubumbashi. Nous sommes aussi dans l'Equateur. Nous contrôlons aussi des villes comme la troisième du pays: Kisangani, et des villes importantes: Bukavu, Goma et Kalemie et même Kindu, Lodja, Lubau. Donc, nous étions fondé, nous avions tous les arguments et tous les raisonnements cartésiens de dire: vous voulez la réunification du pays, alors nous avons besoin de telle institution.

Si nous avions poussé le chantage jusqu'à ce point-là nous aurions même alors raison. Nous avons mis de côté nos intérêts pour faire la paix et réunifier le pays. C'est ainsi que nous avons laissé au gouvernement les postes de président de la république et d'un vice-président de la république; de même le Mlc a une vice-présidence de la république et la présidence de l'Assemblée nationale malgré l'espace qu'il contrôle. Jusqu'où devons-nous aller? Jusqu'à nous dépouiller et, donc, produire une situation d'insécurité, d'instabilité, de déséquilibre? C'est une question de principe. Les éléments en notre possession font état de plusieurs choix: Z'Ahidi Ngoma, membre fondateur du Rcd; Etienne Tshisekedi, on nous parle même de Christian Badibangi. Nous constatons que la situation est dans cet état-là.

Le Rcd avait pris les armes au nom de certains objectifs. Ont-ils été atteints?

Ruberwa acquiesce: Nous sommes parmi ceux qui ont apporté la révolution en 1996. Le 2 août, le monsieur qui est à ma droite qui a le grade de général de division, grade non révisible (Jean-Pierre Ondekane, ndlr) commandait la 10ème brigade la plus importante, avec plus de 15.000 hommes basés à Goma. Général Ondekane a circulé dans le monde entier et, maintenant, il est au comité de suivi ayant la faveur historique de mettre sur pied les institutions. Nous sommes donc qualifiés d'avoir apprécié, à bon juste, que les objectifs de la révolution de l'Afdl dont nous étions membres pour la plupart ont raté. Prenez la liste des ministres en ce moment-là, vous verrez une tendance d'une certaine province au détriment des autres.

L'exercice du pouvoir en soi n'était pas du tout un accord démocratique. Voyez les incidents diplomatiques d'alors, regarder la gestion de la banque nationale! L'argent, c'était à la présidence, en plusieurs liasses. Il y a le manque de démocratie, de l'Etat de droit, nous entrions de plus en plus et en profondeur de la jungle.

Il a suffi un déclenchement de la guerre pour que des atrocités et des exécutions sommaires se passent à travers tous le pays comme ça ne s'est jamais passéauparavant. Dans un tel contexte; est-ce qu'il ne fallait pas prendre les armes?

Aujourd'hui, il y a des changements profonds, parce que vous avez la tendance gouvernementale qui va avoir le 1/5 des ministres et vice-ministres, de même que le Rcd, le Mlc, l'opposition politique et les entités. Y a-t-il un gouvernement dans le passé confectionné avec autant de justesse et de justice?

Nous sommes fiers que la répartition soit équitable, sans aucun avantage supplémentaire, sinon on dirait que nous avions pris les armes pour avoir tel ou tel avantage. Il y a même des institutions citoyennes qui n'existaient jamais auparavant. Nous sommes décidé à changer radicalement les méthodes de gestion. L'argent de l'Etat appartient à l'Etat, le salaire des ministres, si c'est 3.000 dollars, si c'est 5.000, si c'est 1.500, doit s'en arrêter là. Le reste doit suivre le cours du budget. Nous sommes conscients de ce dont nous sommes porteurs: du changement. Notre mise en oeuvre dans les institutions sera remarquable. Les ministères dont nous avons la gestion, tel de l'enseignement supérieur et universitaire, les étudiants auront à nous juger par des solutions à leurs problèmes, avec le concours de tout le gouvernement. Bref, nous nous considérons, peut-être avec orgueil, comme le thermomètre du changement au cours de la transition.

Notre éditeur, Joseph-Boucard Kasonga Tshilunde, a posé la question sur la nationalité, surtout qu'un pasteur, sur les antennes de l'une des télévisions locales, est en train de mobiliser les gens contre les membres du Rcd considérés comme des Rwandais. Il a voulu savoir si cette question a été élaguée.

Me Azarias Ruberwa réfute: La question de la nationalité a été abordée depuis plusieurs décennies et, dans ce processus, la question a été examinée soigneusement. Je dois même dire que les politiciens du Kivu ont une grande part de responsabilité quant à l'intox due à la concurrence, à la jalousie, à l'élimination par des critères du genre «nationalité douteuse». Nous nous référons sur la jurisprudence en matière de loi de l'Union africaine dont l'une des résolutions adoptée au Caire, en 1964 ou un peu après, avait consacré le principe de respecter la date des indépendances comme celle attributive de la nationalité par appartenance.

Pourquoi? Parce que, avant les indépendances, il n'y avait pas de nationalité congolaise, zambienne, zimbabwéenne ou ailleurs. Nous étions des sujets belges selon plusieurs catégories. La pose des principes est venue avec Lusaka qui influence désormais la législation de 1960 en évacuant le principe sur la responsabilité d'appartenance. Maintenant, lorsque les personnes curieuse ou de mauvaise foi posent la question, ils veulent essentiellement se référer à la population rwandophone du Nord et du Sud-Kivu.

Mais le pays a 9 frontières tracées de manière arbitraire, sans consulter personne. Donc, nous nous sommes retrouvés vis-à-vis de la frontière angolaise, congolaise d'en face (j'étais curieux d'apprendre qu'il y a un quartier qui s'appelle Bakongo), zambienne, tanzanienne d'où est venu Mwende Msiri, des populations à cheval.

En âme et conscience, quelque soit votre extrémisme, pourquoi le problème doit seulement se poser aux populations rwandophones? Est-ce que c'est juste? Est-ce que c'est correct? Est-ce que c'est honnête? Est-ce que c'est constructif? Est-ce que c'est susceptible de réconcilier? Moi je dis: non. Les Congolais d'origine rwandophone, qu'ils s'appellent Banyamulenge du Sud, j'en suis un, qu'ils s'appellent hutus ou tutsis du Nord-Kivu, du Rutshuru, du Masisi ou de Goma, j'en connais, ont bel et bien la nationalité congolaise comme vous. Cette question a créé longtemps des mythes, il faut casser le mythe.

Si nous voulons à tout prix chasser ces personnes, parce qu'ils ont la morphologie différente de la nôtre, nous commettons le tort. Parce que l'histoire nous indique que parmi les populations congolaises, il y a des Nilotiques. Vous ne l'êtes pas. Il s'agit de qui? Ils sont tous des Congolais. Nous devons avoir de la hauteur et de la grandeur. Si nous continuons et nous rentrons dans des débats qui n'édifient pas, notre nation va rester en retard. Mais si nous prenons de la hauteur, en très peu de temps, les énergies que nous utilisons dans les guerres fratricides, nous pouvons les capitaliser et construire une grande nation. Aujourd'hui, Japonais, Chinois, Européens, sont dans la nation américaine. C'est pourquoi elle est forte, c'est pourquoi elle peut dire: je me méfie du Conseil de sécurité. Je ne dis pas que nous allons aussi, le jour où nous serons une grande nation, nous méfier du Conseil de sécurité. Mais je dis qu'ils ont la potentialité de se passer de se passer du reste du monde.

Qui constitue la nation américaine aujourd'hui? C'est le monde entier. Savez-vous que nous avons une densité la plus faible? Comment peut-on développer le Congo s'il n'est pas rempli?

Les lois de la nationalité et de l'immigration ont tellement évolué que le pays comme le Canada, son développement en dépend. Il distribue la nationalité. Devons-nous nous opposer à quelqu'un parce qu'il ne nous ressemble vraiment pas? Et celui qui nous ressemble, qu'est-ce qu'il vous donne de plus? Ce type de débat est dépassé.

Le Rcd reste-t-il un mouvement politico-militaire ou il va se transformer en parti politique, et quand?

Réponse du secrétaire général: En s'engageant dans la voie des négociations et en signant l'accord global et inclusif, le Rcd a accepté de se déposséder de sa branche armée qui va constituer, avec les autres armées, l'Armée nationale congolaise. Il est incompatible que nous restions un mouvement politico-militaire au moment où la branche armée fait partie de la nouvelle armée. Concrètement, nous sommes en train de travailler les structures du Rcd comme parti politique. D'ailleurs, le travail est déjà élaboré. Mais nous ne pouvions pas, avant la mise en place de l'accord et des institutions, ne pas être un mouvement politico-militaire.

Prenez le cas des combats de samedi toute la journée. Si nous n'étions qu'un parti politique, notre armée dépendrait de qui? Qui lui donnerait des instructions? Et la population de ce côté-là aurait été protégée comment? C'est une question de simple logique.

Lorsque nous installons les institutions, un seul état-major général, un seul gouvernement et une armée qui va dépendre de ce gouvernement, nous allons, en clair, nous transformer. Les travaux des états-majors se poursuivent. J'ai l'honneur de tenir cette conférence moralement appuyé par 11 hauts officiers qui ont des mérites que l'histoire retiendra. Lorsque le mémorandum 2 a été présenté par la médiation exactement dans le même contexte que l'accord global et inclusif, il résumait les discussions de toutes les composantes qui ne s'entendent pas à 100%.

La médiation a produit un texte adopté et signé par toutes les parties. Lorsque mémorandum a été présenté de cette manière-là, nous l'avons signé, les autres ont refusé de le signer. Ils n'ont pas raison. S'il ne fallait pas signer un accord présenté par la médiation parce qu'on n'est pas satisfait, nous n'aurions jamais signé l'accord global et inclusif où nous n'avions aucune institution à diriger, où le Mlc a reçu la présidence de l'assemblée nationale.

Au nom de quel droit? Au nom de quel principe? Au nom de quel compromis on l'aurait signé? Qui peut me dire qu'est-ce que le Rcd a reçu en terme de concession pour laisser le gouvernement avoir un vice-président de la république en plus du président, et le Mlc le président de l'assemblée en plus du vice-président? De qui sommes-nous débiteurs? De personne. Alors, que l'on en arrive à la question de l'armée, que le gouvernement ait le poste de chef d'état-major général, sans adjoint pratiquement; de renseignements militaires; de commandant des forces aériennes; de commandant adjoint de force terrestre, même le nôtre-là, Et on va nous dire d'ajouter à ce gouvernement-là le commandement des forces terrestres: est-ce un problème d'équilibre, d'équité, de justice ou quoi?

Nos positions sont claires, honnêtes, justes et correctes. Pour rien au monde on ne va pas favoriser que le gouvernement ait trop de pouvoir militaire, sinon on aura combattu pourquoi? Nous le lui interdisons.

La deuxième option, c'est de donner les forces terrestres au Mlc. Au nom de quel principe? Vous ne pensez pas que nous aussi avons des juristes, même des non-juristes qualifiés pour avoir prétendu à diriger l'assemblée nationale? De tous les rapports que nous avons sur toutes les armées du Mlc, Rcd-N, Rcd-Ml, Fac, nous avons la prétention d'avoir une armée la plus disciplinée, mais également la plus efficace sur le terrain. D'ailleurs, le fer de lance de l'armée de demain, c'est notre armée.

Que pensez-vous de l'élection de Z'Ahidi Ngoma comme vice-président de l'opposition non armée?

«Nous n'avons pas honte à être solidaire avec Etienne Tshisekedi pour ces raisons-ci. La première, ce monsieur a marqué l'histoire de ce pays dans l'opposition. Qui peut dire le contraire? Au cours des régimes Mobutu, Kabila 1, Kabila 2, Tshisekedi est resté constant dans l'opposition. La deuxième, nous avons eu une bonne alliance à Sun City. Savez-vous que l'accord et le processus ont été tué à Sun City, enterré à Matadi et ressuscité à Pretoria? Comme homme aussi, nous avons des sentiments. Si nous n'avions pas eu des partenaires dans ce processus, on aurait eu un président et un premier ministre, en exclusion d'une partie du Congo, ouvrant ainsi la voie à la partition. Souvent on nous attribue le contraire de ce que nous sommes: sécessionnistes, partitionnistes, etc. Il suffisait qu'il y ait un président et un premier ministre qui nous ignorent, qui disent que l'Est n'est pas leur affaire, pensez-vous que le pays n'entrait pas dans une phase décisive de division.

Nous avons sillonné le monde, nous avons siégé au Conseil de sécurité, et nous sommes la première rébellion au monde à le faire plusieurs fois. Avec l'Udps, le Palu, le G14 et d'autres, nous avons été à Cape Town avec le président Mbeki. Ce processus, s'il a été ressuscité, il y a des partisans. Ca, c'est de l'histoire. Pour toutes ces raisons-là, nous sommes obligés de choisir Tshisekedi.

Maintenant, il existe des principes que chaque composante doit désigner librement ses candidats. Il est évident que pour les composantes monolithiques (gouvernement, Mlcx, Rcd), le problème ne se pose pas. Mais les composantes plurielles nous produisent plusieurs choix. Si, en dépit de mes préférences, la composante produit un élément que je n'approuve pas, je dois constater.»

La facture du Rwanda s'élève à combien et quelles sont les modalités de son paiement?

RUBERWA: Il est évident que le Rwanda a aidé le Rcd dans son combat, nous n'avons pas honte à le dire. Il est aussi évident qu'avant nous, le Rwanda a aussi aidé le régime en place, l'a même installé, parce que, bien sûr, il y avait eu plusieurs nations dans cette affaire: le Rwanda, le Burundi, l'Ouganda, l'Ethiopie, l'Erythrée, le Zimbabwe, l'Angola. Ces nations ont accompagné l'Afdl jusqu'ici. La question doit être posée d'abord au régime actuel. Il vous a dit qu'il a payé combien, parce qu'il a géré, pendant cinq ans, le bénéfice d'une victoire à laquelle était essentiellement associé d'abord le Rwanda? Pourquoi cette question revient toujours, percutante, et dirigé vers nous alors que vous savez la genèse du régime actuel? Je crois que le Rwanda, en appuyant et l'Afdl et le Rcd, n'avait pas une caution de facture. D'ailleurs, entre nous, combien coûtent ces sacrifices humains de sang? Moi, je ne connais pas le prix.

Vous parlez du Rwanda, mais que faire du Zimbabwe, de l'Angola, de l'Ouganda? Ce sont des questions qui, si jamais elles constituent des litiges, le gouvernement d'union nationale devrait être compétent pour les régler. Au départ, je ne crois pas que l'intervention du Rwanda soit une affaire de business. Non, ce serait dévaluer la contribution d'un pays. Bien sûr qu'il y avait ce problème particulier de génocide rwandais dont la mémoire est encore fraîche. C'est le seul pays qui a travaillé plutôt au nom de l'africanité, de la révolution africaine, parce que le Rwanda a été aidé par l'Ouganda; l'Ouganda a été aidé par la Tanzanie; la Tanzanie a aidé l'Afrique du Sud. C'est ça, l'histoire africaine contemporaine.

Je crois que nous devons avoir la vision d'un Congo nouveau. J'invite tous les Congolais à abandonner l'extrémisme, parce que l'extrémiste tue, abîme. Nous devons nous accepter malgré nos différences, dans le contexte d'un pays de 2.345.000 km', très vaste, un sous-continent, avec 400 peuples. Nous devons en être fiers.

Mais aussi, nous avons l'opportunité de choisir les dirigeants qui répondent au profil. L'un des problèmes de notre pays, selon notre analyse, c'est le leadership, des gens qui occupent des fonctions dont elles ne répondent pas du profil, au nom de la politique ou des intrigues. Si nous saisissons l'opportunité que nous avons de placer des personnes qualifiées, intègres, correctes, intelligentes, réconciliantes, nous démarrons et probablement pour toujours. Mais aussi, nous devons regarder au-delà de nos frontières. Si, dans les nôtres, la réconciliation et la bonne gouvernance seront la règle d'or, ce sera insuffisant si nous ne procurons pas la paix vis-à-vis des pays voisins, essentiellement.