DECLARATION DU CNDD CONDAMNANT SANS RESERVE L’EXPULSION DES DEMANDEURS D’ASILE RWANDAIS

1. Les Faits

En date du lundi 13 juin 2005, les Autorités Burundaises ont procédé à l’expulsion de plusieurs milliers de demandeurs d’asile Rwandais, qui, selon leurs propres déclarations se sentaient menacés au niveau sécuritaire, et s’étaient par conséquent réfugiés en territoire burundais. Cette expulsion massive s’est effectuée en toute illégalité et en l’absence de tout témoin, notamment des agents du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. Par ailleurs, les légitimes préoccupations du HCR envers ces réfugiés n’ont jamais été entendues par le gouvernement burundais. Une enquête au cas par cas devait en effet être menée pour savoir qui de ces femmes, enfants, jeunes et vieux , appelés tantôt immigrés, tantôt fuyards pouvaient bénéficier ou non du statut de réfugié, en application des dispositions internationales des droits de l’homme et particulièrement du droit humanitaire. Nous apprenons tout aussi péniblement, qu’une chasse à l’homme contre des réfugiés ayant passé entre les mailles du filet du rapatriement est aujourd’hui systématique. Des citoyens burundais, manipulés et transformés pour les besoins de la cause en chasseurs de tête humaine, participeraient à cette opération contre une prime de 10.000 Fbu pour chaque tête rwandaise retrouvée et rapatriée.

 2. Les Arguments

Le CNDD :
2.1-Considérant la constitution de la République du Burundi qui, dans son préambule intègre les instruments internationaux du droit en proclamant l’attachement du peuple Burundais « au respect des droits fondamentaux de la personne humaine tels qu’ils résultent notamment de la Déclaration Universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948, des Pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme du 16 décembre 1966 et de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples du 18 juin 1981 » ;
2.2 -Considérant la charte des Nations Unies qui en son article premier, alinéa 3 donne aux Nations Unies, entre autres buts de « Réaliser la coopération internationale en résolvant les problèmes internationaux d’ordre économique, social, intellectuel ou humanitaire, en développant et en encourageant le respect des droits de l’homme pour tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion » ;
2.3-Considérant la Déclaration Universelle des droits de l’homme, notamment en ses articles 3, 10, 14, alinéa 1 qui stipulent respectivement que : « Tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne » « Toute personne a droit, en pleine égalité, à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal indépendant et impartial, qui décidera, soit de ses droits et obligations, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. » « Devant la persécution, toute personne a le droit de chercher asile et de bénéficier de l’asile en d’autres pays. »
2.4-Considérant la charte africaine des droits de l’homme et des peuples qui en son article 12, alinéa 2 qui stipule que « toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien… »
2.5- Considérant la Convention de Genève de 1951 relatif au statut des réfugiés qui définit, en son article 1 alinéa 2, le réfugié comme une personne « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays »
2.6-Considérant cette même convention en son article 31 qui stipule que :
 1. Les Etats contractants n'appliqueront pas de sanctions pénales, du fait de leur entrée ou de leur séjour irréguliers, aux réfugiés qui, arrivant directement du territoire où leur vie ou leur liberté était menacée au sens prévu par l'article premier, entrent ou se trouvent sur leur territoire sans autorisation, sous la réserve qu'ils se présentent sans délai aux autorités et leur exposent des raisons reconnues valables de leur entrée ou présence irrégulières.
 2. Les Etats contractants n'appliqueront aux déplacements de ces réfugiés d'autres restrictions que celles qui sont nécessaires; ces restrictions seront appliquées seulement en attendant que le statut de ces réfugiés dans le pays d'accueil ait été régularisé ou qu'ils aient réussi à se faire admettre dans un autre pays. En vue de cette dernière admission, les Etats contractants accorderont à ces réfugiés un délai raisonnable ainsi que toutes facilités nécessaires. » 2.7-Considérant l’article 32 en ses alinéas 2 et 3 de la convention qui prescrivent que : « 2. L'expulsion de ce réfugié n'aura lieu qu'en exécution d'une décision rendue conformément à la procédure par la loi. Le réfugié devra, sauf si des raisons impérieuses de sécurité nationale s'y opposent, être admis à fournir des preuves tendant à le disculper, à présenter un recours et à se faire représenter à cet effet devant une autorité compétente ou devant une ou plusieurs personnes spécialement désignées par l'autorité compétente. 3. Les Etats contractants accorderont à un tel réfugié un délai raisonnable pour lui permettre de chercher à se faire admettre régulièrement dans un autre pays. Les Etats contractants peuvent appliquer, pendant ce délai, telle mesure d'ordre interne qu'ils jugeront opportune. » 2.8-Considérant l’article 33 alinéa 1 de la convention qui stipule : « Aucun des Etats contractants n'expulsera ou ne refoulera, de quelque manière que ce soit, un réfugié sur les frontières des territoires où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques. » 2.9-Vu qu’aucun délai ni alternative à l’expulsion n’ont été accordés aux réfugiés et aux organisations humanitaires pour trouver une autre terre d’asile; 2.10-Appréciant comme justes et légitimes les déclarations de pays et organisations qui ont condamné les mesures d’expulsion ; 3. Les Actes 3.1.Condamne énergiquement comme illégale et inhumaine l’expulsion des demandeurs d’asile Rwandais ; 3.2.Invite le gouvernement de la République du Burundi à mesurer la gravité de sa décision et à prendre des mesures urgentes en vue de stopper ce rapatriement forcé dans l’attente de l’analyse des dossiers de ces demandeurs d’asile. 3.3. Invite toute personne et toute organisation soucieuse des droits de l’homme ainsi que de l’image du Burundi dans le monde, à condamner sans réserve cette mesure prise en violation du droit international humanitaire. 3.4. Invite le gouvernement à se rappeler que le Burundi est un des pays africains à produire le nombre le plus élevé de réfugiés, et que c’est grâce à l’hospitalité légendaire des citoyens des pays voisins que nos frères et soeurs ont pû trouver asile dans ces pays.malgré les oppositions des gouvernements burundais. 3.5.Rappelle tous les Burundais et Burundaises que c’est grâce au respect du droit international et la générosité des dirigeants des pays voisins et du monde que de multitude de Burundais et Burundaises ont pu échapper à la dictature et à la mort pendant ces 40 dernières années, et à dire haut et fort au gouvernement Burundais de laisser le HCR et les organismes humanitaires déterminer en définitive si les demandes d’asile et de protection sont fondées Fait à Bujumbura le 16/06/2005 Pour le Parti CNDD

Le Président
Léonard NYANGOMA