Une vérité pouvant blesser! 

Paul Kagame, condamné à la mendicité, en visite en Belgique du 8 au 10 décembre 2002.

(Martine SYOEN & Christiaan DE BEULE - vzw SOS RWANDA-BURUNDI asbl)

L’observateur avisé a pu constater que le président rwandais Paul KAGAME et son gouvernement ont perdu toute crédibilité dans la communauté internationale. Institutions internationales, organisations non gouvernementales et même des gouvernements lui tournent le dos et le rendent responsable de la débâcle dans l’Est de la République Démocratique du Congo. Telle la poule faible dans le poulailler Kagame se fait piquer par tous, même par ses anciens alliés. De plus en plus acculé, il risque d’y perdre toutes ses plumes.

Après l’opposition en exil et quelques rares non-alliés, Kagame s’est fait critiquer, prudemment d’abord, puis de plus en plus sévèrement par Amnesty International suivi du International Rescue Committee. Ce n’est qu’après le premier rapport des Nations Unies sur le pillage en RCD que la critique lui est tombée dessus comme une avalanche destructive. L’illusion apollinienne créée autour de l’homme fort du Rwanda s’écroule. Le processus dévastateur s’enclenche. Human Rights Watch oublie le pacte d’Allison Desforges, International Crisis Group critique le système juridique et démoli le leurre d’une soi-disant démocratie si bien que l'administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), Marc Malloch Brown se permet de déclarer le 19 novembre 2002 à AFP que : "(…)le Rwanda où il n'y a pas du tout eu d'élections"

Le "USA State Department" dans son rapport du 4 mars 2002 sur les droits de l'homme au Rwanda dénonce de nombreuses infractions aux droits de l'homme. Ces abus sont aussi apportés dans l'expertise sur le Rwanda préparée pour le gouvernement des Pays-Bas. Reporters Sans Frontières décrit l'anéantissement systématique de toute opinion critique ou d'opposition. Le Fonds Monétaire International abandonne sa politique préférentielle pour le Rwanda et ferme certains robinets. L'ambassade de Belgique au Rwanda formule timidement quelques observations mais les experts appelés à témoigner devant la commission d'enquête sénatoriale sur le commerce avec la RDC dépeignent un tableau dramatique. Madame Carla Del Ponté, procureur du Tribunal Pénale Internationale pour le Rwanda, se sent obligée de sortir des anciens dossiers accablants pour le régime Kagame et exige la collaboration du pays pour finaliser ses actes d'accusations. Paul Kagame est désormais dans l'impossibilité de se faire valoir comme l'intouchable et incontournable leader de l'Afrique des Grands Lacs. Il reçoit le coup le plus dur quand en novembre 2002, les parlementaires britanniques publient le document "Who Benefits from Resource Exploitation in the Democratic Republic of the Congo". Les parlementaires accueillent favorablement le dernier rapport des experts des Nations Unies. Ils soulignent la contradiction entre le "Memorandum of Understanding" du gouvernement britannique envers le gouvernement rwandais et les activités que déploient ce gouvernement rwandais en RDC. Ils recommandent au gouvernement britannique une politique plus stricte envers le Rwanda surtout en ce qui concerne le respect des Droits de l'Homme. Quelques jours après la sortie de ce document le procureur du TPIR s'adresse au parlement britannique en demandant d'imposer au Rwanda sa collaboration pour les dossiers impliquant le FPR.

Kagame, qui a subi l'humiliation d'une scission dans sa propre fraction, est abandonné par ces proches. Etant donné sa nature rancunière, cette situation risque d'avoir des suites fâcheuses dans son entourage direct ainsi qu'envers toute personne qui lui serait hostile.

Nous pouvons nous attendre aussi à des répercussions impitoyables envers son ambassadeur en France, Mr. Jacques Bihozagara. On se rappelle que cet ambassadeur a entraîné Paul Kagame dans une aventure gênante en intentant un procès au journaliste camerounais Charles ONANA. Cet auteur du livre "Les secrets du génocide rwandais" soutient la thèse que Kagame est responsable de l'attentat contre l'avion qui transportait les présidents rwandais et burundais le 6 avril 1994. Cet attentat a déclenché le drame que le Rwanda subit encore aujourd'hui. Dans ce même livre le journaliste accuse le FPR de meurtres sur des civils dès octobre 1990. Une première plainte pour diffamation et non-respect de la présomption d'innocence a été écartée en première instance à Paris, sur des arguments procéduraux. Paul Kagame et le gouvernement rwandais ont fait appel de cette décision et ont renouvelé leurs plaintes en première instance à la réédition du livre. Le cas devait se discuter ce 2 décembre 2002 au tribunal de Paris. Les plaignants ont cependant fait savoir par l'intermédiaire de leurs avocats qu'ils retiraient leurs plaintes. Les avocats, dont le bureau d'avocats belge Uyttendaele, qui avaient introduit la plainte en première instance avaient été remplacés par un bureau français. Ce bureau a reculé devant le nombre de documents rassemblés comme preuve et la qualité des témoins que l'écrivain avait présentés pour sa défense.

Ce retrait de plainte, considéré par certains comme un aveu, donne davantage de crédibilité à la thèse du journaliste Charles ONANA. On peut donc comprendre l'activité soudaine que le procureur du TPIR déploie à l'encontre de Kigali. Rappelons que le procureur est habilité à dresser une accusation à l'encontre d'un président en exercice. Reste toujours l'enquête sur l'attentat de l'avion présidentiel, menée discrètement par le juge d'instruction français Brugière. Cette enquête révélatrice peut devenir décisive pour l'avenir de la paix dans la Région des Grands Lacs.

Paul Kagame, isolé comme un lépreux, comme un pestiféré, s'adresse en dernier recours à ceux qu'il a humilié au moment ou il croyait qu'il pouvait se le permettre : les ministres belges. Il sait qu'il ne doit pas compter sur beaucoup d'indulgence du chef de la diplomatie belge le ministre Louis Michel. Par contre, le Premier ministre belge, Guy Verhofstadt, lui est redevable. Celui ci a réussi à s'imposer politiquement grâce au rôle douteux qu'il a joué lors de la commission d'enquête sénatoriale sur la mort des dix casques bleus belges au Rwanda.

Le nouvel ambassadeur rwandais en Belgique, Mr. Emmanuel Kayitana Imanzi, a présenté ses lettres de créance le 23 octobre2002. Il est trop nouveau en Belgique pour comprendre que le climat préélectoral change complètement les affinités entre politiciens. Verhofstadt est peut-être redevable à Kagame, mais certainement pas suicidaire. Le vent a tourné. Aucun politicien ne risquera sa place pour soutenir un Kagame compromis qui vient mendier. Il est en position de faiblesse; obligé de quémander et de flagorner.