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Canada: Visite privée du président du Rwanda au Canada
(04/06)
Lundi 24 avril 2006
Communiqué de presse
Amnistie internationale s’étonne que des organisations canadiennes et des universités aient invité comme conférencier d’honneur M. Paul Kagamé, actuel président du Rwanda. En effet, tout comme les autres organisations de défense des droits, Amnistie internationale a dénoncé les violations des droits humains commises au Rwanda et dans l’est de la République démocratique du Congo dans de nombreux rapports et communiqués de presse qui se sont échelonnés depuis l’arrivée au pouvoir du Front patriotique rwandais dirigé par M.Kagamé.
Comme le fait remarquer Michel Frenette, Directeur général de la section canadienne francophone d’Amnistie internationale (AI), pas plus tard qu’en janvier dernier, AI exhortait le gouvernement rwandais à veiller au respect du droit à la liberté d’_expression et à agir dans le droit fil des normes internationales relatives aux droits humains (AFR 47/002/2006). « De récents épisodes de harcèlement et d’intimidation des journalistes s’inscrivent dans une politique soutenue de contrôle des médias au Rwanda, rappelle Michel Frenette.
Par ailleurs en mars, Amnistie internationale a appelé le gouvernement rwandais à exhorter tous les chefs de groupes armés impliqués en République démocratique du Congo de mettre immédiatement fin à l’enrôlement et à l’utilisation d’adolescents, et de libérer tous ceux qu’ils ont déjà enrôlés (AFR 62/009/2006). Le gouvernement du Rwanda continue à soutenir les groupes armés congolais actifs dans l’est de la RDC, en violation de l’embargo sur les armes imposé par les Nations unies. L’implication persistante de ce pays résulte principalement de la présence dans l’est de la RDC de groupes insurgés rwandais opposés au gouvernement, ainsi que de l’exploitation des abondantes ressources minérales, entre autres ressources naturelles, de la RDC par les militaires et les milieux d’affaires rwandais (AFR 62/013/2005).
« Enfin, conclut Michel Frenette, les sujets de préoccupations actuelles ne sauraient faire oublier les violations des droits humains commises au cours des années 90. » Dans un rapport publié en avril 2004 à l’occasion du dixième anniversaire du génocide, AI a souligné, outre les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité perpétrés de 90 à 94, le travail d’obstruction du gouvernement rwandais vis-à-vis du Tribunal pénal international pour le Rwanda : Le Rwanda a voté contre la création du Tribunal et il a fait activement campagne contre les procureurs qui se sont succédé. Il a également interdit l’accès au Rwanda aux équipes d’enquêteurs du Tribunal, par exemple en refusant de garantir leur sécurité. De même, il a plusieurs fois empêché l’accusation de prendre contact avec des témoins au cours des procès. (AFR 47/008/2004)
« Par respect pour les nombreuses victimes du FPR, au Rwanda ou en RDC où elles avaient cherché refuge, et tant que justice ne sera pas rendue, Universités et organisations devraient s’abstenir d’honorer M.Kagamé et de lui fournir une tribune. »

 

Génocide au Rwanda
La controverse entourant la visite du président Paul Kagame se poursuit
Mise à jour le mardi 25 avril 2006, 10 h 16 .


Paul Kagame
Paul Kagame
La première visite de Paul Kagame au Canada soulève bien des passions, s'il faut en croire les nombreuses associations qui ont demandé que le président, soupçonné par certains de crimes contre l'humanité, soit déclaré persona non grata par Ottawa.

En effet, celui qui est vu, soit comme le héros qui a ressoudé le Rwanda à la suite du génocide de 1994, soit comme l'auteur d'une violente campagne d'exactions contre l'ethnie hutue, au lendemain de ce même génocide, suscite ici une vive controverse. D'ailleurs, des discours qu'il prononçait, lundi et mardi à Montréal, ont été précédés de manifestants.

Manif contre Paul Kagame
Mardi, ils étaient des dizaines rassemblés dans le centre-ville de la métropole pour dénoncer bruyamment un homme qu'ils accusent d'être un criminel.

Lundi, le chef d'État, invité d'honneur à un colloque sur le développement africain qui se tient à Montréal, a été honoré par l'Université de Sherbrooke.

L'institution voulait ainsi souligner le courage du peuple rwandais pour avoir pu surmonter le défi qu'a posé pour sa cohésion sociale et politique, un génocide qui a fait plus de 800 000 morts en seulement quelques mois.

Manif contre Paul Kagame
L'Université de Sherbrooke, qui a entretenu des relations avec l'Université du Rwanda à diverses reprises, se fait discrète quant à sa décision. Elle explique que l'honneur est destiné au peuple rwandais, et non au président Kagame lui-même.

Jusqu'ici aucune accusation n'a formellement été déposée à ce jour contre Paul Kagame, plusieurs le soupçonnent d'avoir, alors qu'il dirigeait les principales forces rebelles du pays, commandité l'attentat contre l'avion de l'ancien président rwandais.

La mort du président Habyarimana a déclenché le génocide. Paul Kagame est aussi soupçonné, toujours lorsqu'il était à la tête de la rébellion, d'être responsable des massacres de milliers de Hutus et de Tutsis proches de l'ancien régime.

La branche canadienne d'Amnistie internationale a fait part, quant à elle, de son étonnement devant la visite canadienne de Paul Kagame, estimant que « par respect pour les nombreuses victimes du FPR (NDLR : la rébellion dirigée par Paul Kagame), au Rwanda ou en RDC, où elles avaient cherché refuge, et tant que justice ne sera pas rendue, universités et organisations devraient s'abstenir d'honorer M. Kagame et de lui fournir une tribune ».

Le président rwandais n'aura aucune rencontre avec des représentants des gouvernements québécois et canadien.

Extrait audioAline Gobeil rend compte d'une cérémonie tenue à l'Université de Sherbrooke.

Photo André Tremblay, La Presse
Un Congolais, du nom de Serge Welo, a perturbé le début de la soirée, hier, à l'hôtel Delta où se tenait une conférence. L'homme a traité Paul Kagamé de «criminel» et a crié «Vive le Congo!» Des gardes du corps du président rwandais et des agents de sécurité de l'hôtel l'ont maîtrisé et sorti de la salle.
Photo André Tremblay, La Presse