Sorry

Mercred 3 Janvier 2006.
 
Journaliste de France Inter (Patrice, ) Introduction:
 
Bonjour aujourd’hui je reçois Pierre Péan pour son dernier livre “Noires fureurs, Blancs menteurs”, un livre qui suscite beaucoup de polémique  ......
 
Le 6 avril 1994 au Rwanda un avion Falcon 50 venue de Tanzanie s’approche à basse altitude de l’aéroport de Kigali. A son bord, deux chefs d’état africains: le Président du Burundi Cyprien Ntaryamira et celui du Rwanda Juvénal Habyarimana n’ont plus que quelques secondes à vivre. A 20 heures 20, leur avion est abattu par deux missiles tirés du sol. Cet attentat, dont on a toujours pas découvert les responsables, allait aussitôt provoquer une des plus grandes tragédies du 20ème siècle. En quelques mois, dans un des plus petits pays du monde, des centaines de milliers de rwandais allaient être victimes d’un génocide dont certains depuis plus de dix ans accusent encore la France d’être en partie responsable. France Inter Alain Passerelle, le 8 avril 2004:
“C’est un incident diplomatique caractérisé. A Kigali hier au cours des cérémonies du 10 ème anniversaire du génocide, le Président rwandais Paul Kagame dans son discours s’en est violemment pris à la France.(Kagame:) ‘I want to turn to an other country, and I am glad to name names, I don’t mind...’. Je veux parler d’un autre pays et je n’hésiterai pas à le nommer. Leurs menaces et leurs efforts pour nous intimider ne m’impressionnent pas. Je veux parler des français. Leur rôle dans ce qui est arrivé au Rwanda est bien connu. Ils ont sciemment  armé et entrainé les soldats gouvernementaux et les milices qui allaient commettre le génocide, alors même qu’ils savaient qu’ils préparaient un génocide. C’est criminel, et ils ont l’audace de rester là sans s’excuser. Je ne serai pas diplômate sur cette question. Je le dis ici; je le leur dis en les regardant dans les yeux. Et je leur dis que ce qui est arrivé au Rwanda il y a 10 ans ne se reproduira plus.”
 
Journaliste France Inter: Pierre Péan Bonjour! C’était l’actuel Président Paul Kagame en 2004 accusant la France d’avoir dix ans plus tôt armé et entrainé les responsables des plus grands massacres de l’histoire, une opinion d’ailleurs que partagent beaucoup de journalistes qui depuis plus de dix ans condamnent, considèrent que la France et le régime hutu de l’époque étaient responsables directement ou indirectement de ce génocide; mais vous dans votre dernier livre “Noires fureurs, Blancs menteurs” vous écrivez, vous dites qu’ils s’agit d’une histoire truquée, vous parlez même d’un mensonge; que la France a au contraire, dites-vous, les mains propres; que Paul Kagame que l’on vient d’entendre porte une responsabilité écrasante dans ce qui s’est passé au Rwanda; c’est presque du révisionnisme en tout cas ça va à l’encontre de ce qui se dit ou presque tout ce qui se dit ou ce qui s’écrit depuis 10 ans Pierre Péan?
 
Pierre Péan: Oui depuis la sortie de mon livre j’ai été beaucoup attaqué  y compris ce terme horrible de révisionniste. Alors qu’est ce que je peux dire. J’étais face à une histoire manifestement truquée; je dirais que c’est depuis le début jusqu’à la fin, ce sont que mensonges et manipulations. Que faire face à ça. Enquêter, c’est ce que j’ai fait, voir les faits, voir les archives; et quand ça ne va pas donc ... il faut réviser l’histoire. Donc j’essaie de la réviser et c’est la seule façon d’aller vers la vérité. C’est ce que j’ai essayé de faire dans ce livre.
 
Journaliste France Inter: Pierre Vidal-Naquet qui s’y connaissait en la matière distinguait toujours le révisionnisme du négationisme; vous vous ne niez pas qu’il y ait eu un messacre de tutsi mais vous dites simplement qu’il n’y a pas que les tutsi qui ont été massacrés dans cette affaire. En fait je voudrais que l’on revienne brièvement à l’origine de tout ça c’est-à-dire ce conflit entre deux communautés, deux ethnies, dont on arrive mal à comprendre ce qui les distingue, ce qui les oppose; les tutsi et les hutu ils parlent la même langue, il n’y a pas grand’chose qui les distingue sinon leur position sociale, Pierre Péan.
 
Pierre Péan: C’est un des sujets clés; disons que le système au pouvoir et Paul Kagame nient l’existence de tutsi et de hutu; ce qui est bien pratique quand on a 10 % de la population pour diriger l’ensemble. Alors qu’est ce que c’est qu’un hutu qu’est ce que c’est un tutsi? Si je prends un rapport de l’ONU en 1957 on parle des cultivateurs bantous et de l’autre coté des pasteurs hamites. Moi je vais pas trancher entre les scientifiques; ce que je peux assurer c’est que eux savent particulièrement se reconnaitre. Un hutu sait très bien qui est hutu et qui est tutsi, et un tutsi sait très bien qui est tutsi et qui est hutu. Et ça dure depuis très longtemps. Il faut se rappeler l’histoire. Les Tutsi ont dirigé le pays pendant quatre siècles. Et tout ça a été remis en cause seulement à la fin des années 50 et tout simplement par l’influence de l’ONU , notamment qui a estimé qu’il fallait que la majorité ait accès au pouvoir, parce que jusqu’à la fin des année 50 les hutu étaient dans un système de quasi-esclavage. Mais il faut toujours remonter à cette époque là pour comprendre ce qui s’est passé.
 
Journaliste France Inter: Ce que vous faites rappelons que au moment de l’indépendance lorsque le Rwanda cesse d’être une colonie belge, les hutu sont au pouvoir, poussant un certaine nombre de tutsi très minoritaire dans le pays au Rwanda à émigrer, un grand nombre émigre vers les pays voisins notamment au Nord en Uganda où  se crée sous l’autorité de Paul Kagame le Front Patriotique Rwandais, le FPR, dont l’objectif avoué d’ailleurs est de prendre le pouvoir à Kigali, de rentrer les armes à la main au Rwanda.
 
Pierre Péan:Exactement, donc ça c’est passé le 1 octobre 1990, des rebelles tutsi dirigés d’abord par un certain Rwigema et ensuite par Paul Kagame, armés complètement par Museveni le patron de l’Uganda; pourquoi? ça c’est intéressant de le savoir, c’est que les rebelles tutsi avaient aidé Museveni à prendre le pouvoir en 1990 (?) en Uganda . Et donc en échange le président de l’Uganda a armé, et ça jusqu’à la fin, a armé Paul Kagame et ses hommes. Donc ils franchissent la frontière, et ce n’est pas un mouvement de libération ordinaire, il y avait des négociations entre hutu et tutsi, et donc Paul Kagame a voulu prendre par la force Kigali .
 
Journaliste France Inter: Alors dans ces négociations, la France joue déjà, (qui est présente militairement à l’époque), joue déjà un rôle important. On peut se demander ce que vient faire la France qui sera plus tard au banc des accusés, ce que vient faire la France dans cette ancienne colonie belge. Pierre Péan.
 
Pierre Péan: Il faut se replacer en 1990, juste au moment de La Baule où  François Mitterand essaie de pousser la démocratisation des pays d’Afrique. Et il se trouve que Habyarimana qui est en difficultés, devient le bon élève, parce qu’il sait qu’il a besoin de force, il sait qu’il y a une menace des rebelles tutsi, donc il devient le bon élève. Et la France , et ça c’est très très important, ne serait jamais allée longuement au Rwanda si les belges avaient assumé leur héritage historique. Et donc ces belges et français aident, dans un premier temps, Habyarimana à résister aux rebelles tutsi, mais la seule différence est que les belges repartent peu de temps après, alors que les français restent.
 
Journaliste France Inter: Mais Habyarimana n’est pas un saint quand même! On dit que c’est un des pires dictateurs d’Afrique à l’époque.
 
Pierre Péan: Alors, replaçons nous toujours en 90. La désinformation menée par Paul Kagame a fait de Habyarimana le dictateur NAZI tropical, quelque chose qui est l’horreur absolue. Mais si vous preniez les papiers aussi bien du FMI que de ceux qui suivent dans les média le Rwanda , on s’apperçoit qu’en 89 – 90, c’est un régime qui est plutôt dans le top des régimes africains. Il fait plutôt bon vivre à Kigali que dans la plus part des pays d’Afrique. Et donc c’est seulement après coup qu’il y a eu une désinformation sur Habyarimana. Je ne suis pas entrain de dire non plus que Habyarimana était à la tête d’un régime tout à fait d’enfant de choeur, ça c’est une évidence.
 
Journaliste France Inter: En tout cas il cède à l’évidence aux pressions de la France qui souhaite que Habyarimana ouvre le gouvernement rwandais au FPR. Il y aura donc ces fameux accord d’Arusha en 1993, entre le FPR justement et Habyarimana et c’est dans ce contexte que le 6 avril 1994 se produit l’attentat qui a déclenché le génocide; Jean Helène, correspondant de RFI à Nairobi rapporte:
“On ignore encore si l’avion présidentiel s’est écrasé accidentellement où  s’il a été abattu, mais un témoin joint par téléphone à Kigali affirme avoir entendu deux explosions quelques secondes avant que l’appareil ne s’écrase. La mort du président Habyarimana intervient dans un climat politique tendu au Rwanda ; le chef de l’état était accusé par l’opposition et les rebelles du Front Patriotique Rwandais de retarder notamment la création d’un gouvernement à base élargie.”.
Et c’était Jean Hélène de RFI qui a été assassiné en 2003 en Cote d’Ivoire, et qui commentait donc cet attentat dont les conséquences allaient être incalculables, Pierre Péan mais dont on ne sait toujours pas qui l’a commis et qui en était le commanditaire. Selon vous c’était de toute évidence Paul Kagame, c’est à dire le FPR.
 
Pierre Péan: Effectivement c’est Paul Kagame avec ce qu’on appelle un Network Commando qui a monté cet attentat. Et cet attentat se situe dans une logique de prise de pouvoir commencée en avril 1990 et c’est le point final. Ca c’est très très important.
 
Journaliste France Inter: Et que’est ce qui vous permet de l’affirmer?
 
Pierre Péan: Eh bien ce qui me permet de l’affirmer c’est d’abord d’avoir moi-même mené une enquête. Moi la première fois que je l’ai dit c’est en 1997et en 2000, et donc maintenant il y a beaucoup de témoignages. Il y a le témoin numéro un du juge Bruguière qui vient de sortir un livre et qui a été au centre du Network Commando, et donc qui a plein plein d’élements et dans les prochains jours, dans les prochaines semaines le juge Bruguière va lancer les conclusions de son enquête et c’est donc Paul Kagame qui est à l’origine. Or ça change tout et c’est ça l’objet de mon livre. Dans la mesure où Paul Kagame, qui aujourd’hui, qui est au fonds le représentant des victimes, des tutsi, envers qui toute la communauté internationale s’agenouille, eh bien lui a une responsabilité première dans le génocide. Pourquoi! Tout le monde s’accorde à dire que c’est cet attentat qui a été le facteur déclenchant. Dans la mesure où c’est Paul Kagame.....
 
Journaliste France Inter: Mais est ce qu’il le savait, il savait qu’ensuite les tutsi risquaient d’être les victimes de cet attentat contre le président hutu contre Habyarimana?
 
Pierre Péan: Ce qui va sortir dans les prochaines semaines effectivement va montrer que Paul Kagame était parfaitement conscient que cet attentat allait déclencher des massacres. Je ne dis pas qu’il savait exactement ce qui s’est passé, il savait que ça allait déclencher les massacres chez les tutsi. Il savait en tout cas que les dizaines de milliers de tutsi allaient périr. Et donc il l’a fait totalement consciemment.
 
Journaliste France Inter: Alors immédiatement la France qui a quitté militairement, qui n’est plus à ce moment là au Rwanda , la France intervient. Une petite opération militaire. Il s’agit tout simplement d’évacuer les ressortissants français. Mais alors on a beaucoup accusé la France là encore d’avoir abandonné à leur sort les tutsi en n’emmenant que les français qui se trouvaient à Kigali .
 
Pierre Péan: C’est important de voir que les accusations contre la France elles ont commencé dès 93. Et elles sont initiées par Paul Kagame lui-même. Pourquoi? Parce que la France s’est interposée et a empêché Paul Kagame de prendre le pouvoir au moment où  il le souhaitait. Donc il a dès 1993 lancé des accusations très graves comme quoi les français par exemple entrainaient les miliciens, ça c’est la première attaque, mais la deuxième grande attaque a été au moment de l’opération Amarylis c’est- à-dire au moment où  les militaires français ont été récupérer les français, et l’accusation qui a été faite a été que les tutsi de l’ambassade ont été abandonnés. C’est déjà un mensonge éhonté. L’Ambassadeur et tous les gens autour ont tout fait pour aller les récupérer. Et donc c’est des gens qui ont été sauvés par des français qui aujourd’hui véhiculent ces mensonges dont l’origine est à Kigali .
 
Journaliste France Inter: En tout cas pendant ce temps là dans tout le pays des centaines de milliers de tutsi sont massacrés par les milices hutu, comme le constate d’ailleurs un des rares reporters qui s’y sont rendus, France Inter Nicholas Poincarré au Rwanda, le 29 mai 1994:
“quand on roule sur les pistes du Rwanda, on sent les villages avant de les voir. Une odeur de mort et de charogne vous force à vous boucher le nez, un ou deux village avant la traversée de chaque hameau. Des kilomètres et des kilomètres, au milieu des plantations de café et de banane, il n’y a plus personne de vivant. Et l’on est tout surpris d’entendre tout d’un coup un enfant qui pleure. Ici les massacres ont eu lieu à la mi-avril, les miliciens se sont livrés à une extermination systématique de tous les tutsi. Les rescapés disent que sur les 10000 habitants de la commune, au moins 8 000 sont morts.....Derrière l’Eglise avec le sol rouge de sang, 4 000 tutsi ont été tués à Shangi.”.
Ces massacres des tutsi Pierre Pean par le hutu vous ne les niez pas
Pierre Péan: Absolument pas; c’est horrible d’entendre cette évocation. La seule chose que je dis c’est qu’il n’y a pas eu que cela. Il n’y a pas eu que des massacres de tutsi. Il y a eu à la même période et notamment dans tout l’Est du pays des massacres de hutu aussi. et donc j’ai essayé de voir l’ensemble du phenomène, dont le point d’origine je rappelle est le déclenchement par l’attentat.
 
Journaliste France Inter: Vous évoquez aussi la responsabilité, avant même les massacres de 94, d’une espèce de lobby, de ce que vous appelez les “blancs menteurs”, d’ailleurs de lobby pro-FPR, pro-tutsi qui a effectivement noirci ce que avait pu faire la France et surtout à considérer que seuls les tutsi avaient été massacrés ou presque avec ceux qu’on a appelé les hutu modérés, alors là-dedans vous mettez les journalistes français et belges, vous mettez aussi l’ancien président de l’association humanitaire Survie, Jean Carbonare et son successeur François-Xavier Verschave, vous mettez même d’ailleurs le représentant de l’ONU le général canadien Dallaire, parmi les gens qui ont vraiment contribué justement à truquer cette histoire.
 
 
Pierre Péan: J’aurais pu appeler mon livre l’histoire des mensonges rwandais parce que je pense que le mensonge est totalement essentiel. Déjà Paul Kagame lui-même est un homme de renseignement; il ne faut jamais oublier ça. Et dès le début il a compris que c’est pas seulement par les armes qu’il devait prendre Kigali, mais aussi par la désinformation et donc la désinformation est au coeur de la prise de pouvoir. Donc Paul Kagame et ses hommes se sont servis des exilés tutsi, aussi bien en Belgique qu’en France et dans le monde entier pour véhiculer leur propre version des choses, mais ils ont trouvé des relais en France et en Belgique; c’est ce que j’appelle les “blancs-menteurs”, et donc dont l’activité a commencé dès 90, dès le début de la prise de pouvoir, mais le point important est arrivé en 93 où  déjà la France était accusée dès 93, et par un personnage dont je parle longuement qui était le président de Survie de l’époque, qui est Jean Carbonare. Et donc il raconte qu’il a vu, qu’il était au camp de Bigogwe, où  des militaires français ont vu des camions entiers de tutsi, et je dis que ça c’est faux. C’est le début des manipulations contre la France . Et après cela a continué. Et ça a continué essentiellement au moment de l’Opération Turquoise.
 
Journaliste France Inter: Justement elle se déclenche le 23 juin 1994, c’est-à-dire deux mois et demie après le début des massacres, une opération destinée à empêcher les massacres et justifiée par le président de la République française de l’époque, François Mitterand, le 5 juillet 1994. (......)  ... Tandis que la France continuait d’être accusée pour cette opération qui était une apparemment une opération humanitaire, Pierre Péan. On a du mal à comprendre. D’après ce qu’on a dit on protégeait en fait les assassins, c’est à dire les hutus qui se réfugiaient, qui fuyaient le pays justement et on voulait même dissimuler les choses inavouables.
 
Pierre Péan: Les attaques contre la France , extraordinairement violentes ont commencé à la mi-juin, c’est-à dire au moment où  Alain Juppé, Ministre des Affaires Etrangères, a commencé à parler d’une opération faite par la France . J’emmène les documents, et notamment un verbatim du Conseil Restreint, où  l’on voit bien dans quelles circonstances est prise cette décision française, c’est une décision purement humanitaire. Mais Kigali, Paul Kagame n’en veut pas. Il lance ses relais de désinformation avec une violence folle contre la France .
 
Journaliste France Inter: Et au moment où  le FPR qui avait commencé, qui avait déclenché cette nouvelle offensive à partir de l’Uganda s’emparait de Kigali pour mettre en place dites-vous un régime au moins aussi brutal que celui de Habyarimana, c’est vous qui le dites, Pierre Péan. Et cela dit les Français quittent le Rwanda en Août 1994, l’opinion internationale se détourne alors progressivement de ce qui allait s’y passer, et où  des massacres justement se produisent encore, non plus contre des tutsi qui sont au pouvoir mais cette fois-ci contre les hutu, comme le massacre du camp de Kibeho où  l’on empeche un medecin de MSF d’entrer  (....Témoignage d’un médecin de MSF, d’un journaliste de RFI et de Sixbert Musangamfura appelé ici ancien premier ministre par un journaliste de RFI sur les massacres du FPR qui concernaient exclusivement les hutu...).
 
 
Pierre Péan: Le Médecin a parlé d’exterminer les hutu de Kibeho. Ce qui est extraordinaire c’est comment les journalistes, comment toute la classe médiatique, comment ils n’ont pas pris conscience de la vraie nature de Kagame. Il s’est exprimé, on n’était plus dans la conquête du pouvoir à l’intérieur du Rwanda ; on était à l’extérieur pour aller chasser les hutu. On ne pouvait plus à partir de ce moment là se voiler les yeux, et donc pour moi c’est extraordinaire et je crois que la communauté internationale, n’a plus voulu remettre en cause, elle s’est voilée les yeux parce qu’elle s’est mal comporté en 94 elle a laissé faire ce génocide et donc il y a une responsabilité enorme à l’égard de ceux qui ont été exterminés.
 
 
Journaliste France Inter: Si la France n’a rien à se reprocher, si Kagame est au moins aussi brutal que son prédecesseur comme vous l’affirmez, pourquoi se contente-t-elle de dire “ben nous nous avons les mains propres”, sans attaquer ce régime qui, dites-vous encore une fois, est aussi brutal que le précédent?
 
Pierre Péan: Après enquête, j’affirme que les gens de l’Opération Turquoise se sont bien comportés et ont véritablement mené une opération humanitaire. Et effectivement la question que j’ai eu pendant mon enquête, c’est pourquoi la France ne s’est pas bien défendue? Et je dirais même, pourquoi elle n’a pas attaqué, parce que la France elle a les mains propres, comme vous disiez tout à l’heure. C’est le seul pays qui a tenté de faire quelque chose. Il est évident qu’il n’a pas réussi sur toutes les lignes, c’est une évidence. Mais notamment sur l’opération Turquoise les buts étaient totalement des bons, et la façon de l’exécution était parfaitement. Alors pourquoi, ça c’est passé, eh bien ça je comprends pas l’attitude, c’est une affaire que je n’ai pas compris lors de mon enquête.
 
Journaliste France Inter: Est-ce que ça ne compromet pas définitivement sa politique en Afrique, la Françafrique que vous même vous critiquiez il y a longtemps dans un de vos premiers livres Pierre Péan?
 
Pierre Péan: Je crois que, il y a un mot, le mot génocide a bloqué tout le monde; parce qu’on ne sait pas comment gérer ça; c’est ce mot qui a été affecté. Il y a bien eu un génocide, et c’est vrai que ça affecte la politique française depuis 94.
 
Journaliste France Inter: Merci Pierre Péan je rappelle le titre de votre livre: “Noires fureurs, Blancs menteurs”, une enquête publiée sous les Editions Milles et une Nuit. A lire également sur le sujet pour d’autres points de vue que le votre, publié déjà il y a quelques années: «L’inavouable » de Patrick de Saint-Exupéry qui dit radicalement le contraire de ce que vous avez dit. ....