RWANDA : LA RÉPRESSION S'ACCROÎT CONTRE L'OPPOSITION
 
 
Dernière modification le : 23 avril 2003

Index AI : AFR 47/004/2003

Amnesty International lance un appel au gouvernement rwandais pour qu'il assure la sécurité des personnes dont les noms figurent dans le rapport de la commission parlementaire réclamant la dissolution du Mouvement Démocratique Républicain (MDR), un parti d'opposition.

Le 15 avril, le parlement rwandais a voté en faveur de la dissolution du MDR après avoir approuvé à une large majorité le rapport de la commission parlementaire accusant le MDR de propager une idéologie « de division ». Quarante-sept noms étaient cités dans ce rapport, dont ceux de deux ministres du gouvernement, de cinq députés de l'Assemblée nationale de transition, de trois hauts responsables militaires et d'un ambassadeur.

« La récente purge de membres du MDR et sympathisants supposés avant un référendum constitutionnel prévu en mai, une élection présidentielle en août et des élections parlementaires en octobre, constitue une atteinte flagrante aux droits fondamentaux de ces personnes », a déclaré l'organisation.

Le rapport de la commission parlementaire va au-delà de la dissolution du principal parti d'opposition et attaque la Ligue rwandaise pour la promotion et la défense des droits de l'homme, la LIPRODHOR - principale organisation non-gouvernementale indépendante de défense des droits humains au Rwanda. Lors d'une session plénière du parlement, le vice-président de la commission parlementaire a accusé la LIPRODHOR d'avoir obtenu des financements étrangers pour le MDR. La pression s'exerce également sur les médias ; des journalistes ont été arrêtés et/ou forcés de fuir le pays pour avoir fait paraître des éditoriaux ou des dessins satiriques critiquant la politique du gouvernement actuel à l'encontre du MDR.

Neuf ans après le génocide et le conflit armé de 1994, le Rwanda se trouve à un carrefour, alors que la période de transition définie par les accords d'Arusha touche à sa fin. En dépit des promesses d'une nouvelle ère, des restrictions partisanes concernant les libertés civiles et politiques font obstacle à la réconciliation nationale et à la transition vers la démocratie.

Les allégations infondées à l'encontre des personnes dont le nom apparaît dans le rapport semblent faire partie d'une campagne de répression orchestrée par le gouvernement contre l'opposition. Les forces de sécurité rwandaises ont dressé des listes de réunions clandestines qu'aurait tenues le MDR dans les régions de Kigali et Cyangugu pour y promouvoir son idéologie « de division », terminologie vague utilisée par le gouvernement pour priver l'opposition de son droit de représentation en cette année d'élection.

L'action du parlement met en danger la vie et le bien-être de toutes les personnes dont le nom est cité dans le rapport. L'une des personnes nommées, le Dr Leonard Hitimana, député, a « disparu » le 7 avril. Le président Paul Kagame a réclamé la démission de Célestin Kabanda, secrétaire d'État aux finances et à la planification économique, également cité dans le rapport. Le gouvernement a publiquement appelé à la mise à l'écart de toute vie publique de ces personnes.

Craignant apparemment pour leur sécurité, deux hauts responsables militaires dont les noms figurent dans le rapport, le général Emmanuel Habyarimana, ancien ministre de la défense et le lieutenant-colonel Balthazar Ndengeyinka, représentant l'armée au parlement, ont fui en Ouganda le 30 mars.

Il est clair que les proches, le personnel et les amis des personnes dont les noms figurent dans le rapport courent également des risques. Damien Musayidizi, secrétaire auprès du ministre de la Défense ainsi que l'ancien secrétaire d'Emmanuel Habyarimana ont « disparu » le 3 avril. Le commandant Félicien Ngirabatware, directeur de l'école militaire de Ruhengeri et ami personnel du général Emmanuel Habyarimana, serait détenu au secret au centre de détention militaire de Kami à Kigali suite à son arrestation le 1er avril.

Amnesty International appelle également le gouvernement rwandais à protéger les droits fondamentaux que sont le droit à la liberté d'opinion et d'expression et le droit à la liberté de réunion et d'association pacifiques. Toutes les organisations de la société civile et toutes les organisations politiques pacifiques, y compris le MDR, doivent pouvoir jouir de ces droits.




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