Les conventions internationales et les lois rwandaises interdisent la détention des enfants mineurs avec des adultes. Au Rwanda, malgré la législation en vigueur, 302 enfants de moins de 5 ans croupissent dans des prisons selon la responsable nationale de ces lieux de détention.

 

La photo ci-dessus, tirée d'igitondo.com, montre une ribambelle d'enfants dans la prison de Muhanga (ex-Gitarama). Ils sont en prison, sans éducation ni instruction. Toutes les prisons du Rwanda regorgent des bambins dans une telle situation. Qu'ont-ils fait pour mériter cela?

 

 

302 enfants de moins de 5 ans en prison

Dans sa conférence de presse donnée le 31/01/2011 à Kigali, Mary Gahonzire, responsable des prisons rwandaises, a donné des informations dont certaines frisent le scandale. En effet, elle a entre autres révélé que 302 enfants de moins de 5 ans croupissent dans les prisons du pays.

Ces traitements inhumains infligés aux enfants sont pourtant condamnés non seulement par la déclaration universelle des droits de l’homme mais aussi par la convention internationale des droits de l'enfant. Pire encore, le Rwanda a promulgué, en date du 28/4/2001, la « loi n°27/2001 relative aux droits et à la protection de l’enfant contre les violences ». Cette loi précise qu’en cas d'emprisonnement, l'enfant doit être séparé des adultes (art 21). D’autres articles de la loi garantissent à l’enfant les bonnes conditions pour son développement physique, mental, social et stipulent spécifiquement qu’il faut lui éviter toute situation qui le soumet à un stress.

Justifier l’injustifiable

Mary Gahonzire a eu le culot de déclarer, au cours de sa conférence, que ces enfants sont en bonne santé ! C’est du cynisme. Dans les prisons rwandaises, celui qui en sort est physiquement et mentalement diminué à cause des mauvaises conditions de détention. Des observateurs avertis n'hésitent pas à qualifier les prisons rwandaises de prisons-mouroirs car le taux de mortalité et de morbidité y très est élevé. Déjà après la prise pouvoir du FPR, l’ONG Médecins Sans Frontières signalait que de septembre 1994 à fin mai 1995, 7003 prisonniers, en attente de jugement, étaient entrés dans la prison, et que 902 y étaient morts (13%). Un prisonnier sur huit était décédé durant cette période de neuf mois du fait des conditions inhumaines d'incarcération, dues principalement au manque d'espace vital. Dans les années qui ont suivi et selon les rapports du « Bureau de la démocratie, des droits humains et du travail » du Département d’État des États-Unis d’Amérique, des dizaines de milliers de détenus arbitrairement arrêtés et illégalement détenus dans les prisons rwandaises surchargées sont morts sans jugement dans les mains de l'État. Ce Département a recensé 860 décès en 1997, 3.300 décès en 1998, 1.148 décès en 1999, 1100 décès en 2000, 708 décès en 2001. Si les adultes ne peuvent pas résister aux conditions de ces prisons, comment cette responsable peut-elle oser dire que les enfants de moins de 5 ans, soumis à ces conditions, sont en bonne santé ?

Des chiffres farfelus

Les tribunaux Gacaca ont jugé au moins 1,5 million de cas selon l’agence « AllAfrica.com » du 24 Juin 2009. Le journal « Le Monde » du 30/05/2008 rapportait que 800 000 personnes ont été jugées et que plus de 600 000 ont été condamnées. Ces chiffres posent eux aussi problème. Sur les 600.000 condamnés, seuls 1/10 est en prison. Où sont passés les 500.000 restants ? Il est vrai que certains prisonniers sont affectés aux Travaux d’Intérêt Général (TIG) mais le déficit reste flagrant. La mortalité élevée dans les prisons, les disparitions des prisonniers, … peuvent-elles expliquer la non concordance de ces chiffres ? Les défenseurs des Droits de l’Homme devraient se pencher sérieusement sur la question.

Gaspard Musabyimana
07/02/2011