RWANDA Lettre ouverte à tous les membres du parlement rwandais

RWANDA Lettre ouverte à tous les membres du parlement rwandais afin de les exhorter à rejeter l'accord d'impunité relatif à la Cour pénale Internationale signé avec les États-Unis Le 29 juin 2003 Amnesty International Index AI : AFR 47/007/2003 Monsieur le Député, Amnesty International déplore que le Rwanda ait signé avec les États-Unis d'Amérique un accord bilatéral garantissant l'impunité des ressortissants de ce pays qui pourraient être accusés par la Cour pénale internationale (CPI) de génocide, de crimes contre l'humanité et crimes de guerre, y compris les crimes commis en territoire rwandais.

 Amnesty International s'adresse à vous afin de vous exhorter à refuser la signature de cet accord qui pourrait amener le Rwanda à violer les obligations qui lui incombent au regard du droit international, notamment s'il refusait de déférer à la justice les responsables des crimes les plus graves au regard du droit international.

 Amnesty International a œuvré pendant près de dix ans à la création de la CPI qu'il considère comme un mécanisme essentiel pour mettre fin à l'impunité des auteurs des crimes les plus graves que connaisse la communauté humaine. Personne ne devrait pouvoir bénéficier de l'impunité pour de tels crimes. Amnesty International et la plus grande partie de la communauté internationale pensent que les inquiétudes du gouvernement des États-Unis qui craint que la CPI n'engage des poursuites à l'encontre de ressortissants américains pour des raisons politiques sont totalement infondées. 

Les importantes garanties contenues dans le Statut de Rome, notamment en ce qui concerne l'équité des procès, excluent une telle possibilité. Amnesty International est convaincue que la CPI, formée de 18 juges parmi les plus qualifiés et respectés de la communauté internationale et d'un procureur hautement qualifié et expérimenté, saura dissiper les craintes du gouvernement des États-Unis et que celui-ci finira par modifier son attitude actuelle.

 Amnesty International espère que vous voudrez bien prendre connaissance des arguments juridiques qui s'opposent aux accords d'impunité et qui sont exposés en détail dans le document intitulé Cour pénale internationale. La campagne américaine en vue d'obtenir l'immunité de juridiction pour les actes de génocide, les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité (index AI : IOR 40/025/02), publié par Amnesty International en août 2002 et disponible à l'adresse suivante : http://web.amnesty.org/library/index/fraIOR400252002. * Les accords d'impunité sont illégaux car ils engagent les États à bafouer les obligations qui leur incombent au regard du droit international, et notamment au regard du Statut de Rome, qui disposent qu'ils doivent déférer à la justice les responsables de génocide, de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre. * Les accords d'impunité ne sont pas autorisés par le Statut de Rome.

 Les affirmations des États-Unis selon lesquelles de tels accords sont prévus par l'article 98 du Statut sont erronées comme de nombreux juristes, dont ceux d'Amnesty International, l'ont montré. L'article 98 a été rédigé afin de tenir compte des accords existants sur le statut des forces. Ces accords servent à déterminer quel est l'État compétent pour enquêter sur des crimes commis par des forces armées stationnées hors de leur pays d'origine et en poursuivre les auteurs ; ils ne peuvent être invoqués pour permettre aux ressortissants d'un État d'échapper à la justice internationale. 

* En ce qui concerne les ressortissants des États-Unis qui ne seraient pas remis à la CPI, les accords d'impunité ne contiennent aucune garantie qu'ils seront jugés aux États-Unis ou ailleurs. Dans certains cas, il serait même impossible de les traduire devant un tribunal américain, car le Code pénal des États-Unis ignore bon nombre de crimes que reconnaissent le droit international et le Statut de Rome. Les juristes de l'Union européenne ont aussi analysé ces accords et sont arrivés à la même conclusion : «[...] la signature avec les États-Unis d'accords – sous leur forme actuelle – serait contraire aux obligations des États parties à la CPI au regard du Statut et pourrait être incompatible avec d'autres accords internationaux auxquels ces États sont parties».

 L'Union européenne a d'autre part publié des principes directeurs analysés par Amnesty International dans le document intitulé Cour pénale internationale. L'Union européenne doit prendre des mesures plus efficaces afin d'empêcher ses membres de conclure des accords d'impunité avec les Etats-Unis (index AI : IOR 40/030/02), publié en octobre 2002 et disponible à l'adresse suivante : http://web.amnesty.org/library/index/fraIOR400302002

Un État qui ratifierait un tel accord d'impunité renoncerait aussi à son droit souverain de choisir le tribunal compétent – un de ses propres tribunaux, un tribunal d'un pays ayant déposé une demande d'extradition ou la CPI – pour juger les personnes appréhendées sur son territoire et accusées de crimes, y compris de crimes commis sur ledit territoire. 

Si les États-Unis décident par exemple de ne pas ouvrir d'enquête ou de procédure contre un accusé, l'État qui aurait remis cette personne aux autorités américaines n'aurait aucun moyen de contraindre l'accusé à revenir sur son territoire aux fins d'enquête et de procédure devant ses propres tribunaux ou devant les tribunaux d'un autre pays, ou afin de le remettre à la CPI. D'autre part, tout État qui ratifierait un tel accord devrait renégocier les traités d'extradition existants avant que l'accord soit effectif ; il s'agit là d'une entreprise de longue haleine et qui risque d'être bien inutile, car de nombreux États ont déjà fait savoir qu'ils s'opposeraient à de telles renégociations.

 Je voudrais aussi vous faire remarquer qu'à notre connaissance les États-Unis n'ont pris aucune mesure de rétorsion contre les États qui ont refusé de signer de tels accords. La Loi relative à la protection du personnel des forces armées américaines qui autorise le retrait de l'aide militaire donne aussi au président le pouvoir de bloquer la procédure quand l'«intérêt national» est en jeu. Le gouvernement américain n'est donc nullement obligé de mettre un terme à son aide militaire si un accord d'impunité n'est pas signé. Nous espérons que vous refuserez l'accord proposé ou tout autre accord qui viserait à garantir l'impunité des personnes accusées de génocide, de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre. Nous espérons aussi que vous aurez à cœur de promouvoir l'adhésion du Rwanda au Statut de Rome de la Cour pénale internationale dans les meilleurs délais. 

Veuillez agréer, Monsieur le Député, l'assurance de ma haute considération. Martin Macpherson Directeur Droit international et Organisations internationales afin de les exhorter à rejeter l'accord d'impunité relatif à la Cour pénale Internationale signé avec les États-Unis Le 29 juin 2003 Amnesty International Index AI : AFR 47/007/2003 Monsieur le Député, Amnesty International déplore que le Rwanda ait signé avec les États-Unis d'Amérique un accord bilatéral garantissant l'impunité des ressortissants de ce pays qui pourraient être accusés par la Cour pénale internationale (CPI) de génocide, de crimes contre l'humanité et crimes de guerre, y compris les crimes commis en territoire rwandais.

 Amnesty International s'adresse à vous afin de vous exhorter à refuser la signature de cet accord qui pourrait amener le Rwanda à violer les obligations qui lui incombent au regard du droit international, notamment s'il refusait de déférer à la justice les responsables des crimes les plus graves au regard du droit international. 

Amnesty International a œuvré pendant près de dix ans à la création de la CPI qu'il considère comme un mécanisme essentiel pour mettre fin à l'impunité des auteurs des crimes les plus graves que connaisse la communauté humaine. Personne ne devrait pouvoir bénéficier de l'impunité pour de tels crimes.

 Amnesty International et la plus grande partie de la communauté internationale pensent que les inquiétudes du gouvernement des États-Unis qui craint que la CPI n'engage des poursuites à l'encontre de ressortissants américains pour des raisons politiques sont totalement infondées. Les importantes garanties contenues dans le Statut de Rome, notamment en ce qui concerne l'équité des procès, excluent une telle possibilité. 

Amnesty International est convaincue que la CPI, formée de 18 juges parmi les plus qualifiés et respectés de la communauté internationale et d'un procureur hautement qualifié et expérimenté, saura dissiper les craintes du gouvernement des États-Unis et que celui-ci finira par modifier son attitude actuelle.

 Amnesty International espère que vous voudrez bien prendre connaissance des arguments juridiques qui s'opposent aux accords d'impunité et qui sont exposés en détail dans le document intitulé Cour pénale internationale. La campagne américaine en vue d'obtenir l'immunité de juridiction pour les actes de génocide, les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité (index AI : IOR 40/025/02), publié par Amnesty International en août 2002 et disponible à l'adresse suivante : http://web.amnesty.org/library/index/fraIOR400252002. *

 Les accords d'impunité sont illégaux car ils engagent les États à bafouer les obligations qui leur incombent au regard du droit international, et notamment au regard du Statut de Rome, qui disposent qu'ils doivent déférer à la justice les responsables de génocide, de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre. * Les accords d'impunité ne sont pas autorisés par le Statut de Rome.

 Les affirmations des États-Unis selon lesquelles de tels accords sont prévus par l'article 98 du Statut sont erronées comme de nombreux juristes, dont ceux d'Amnesty International, l'ont montré. L'article 98 a été rédigé afin de tenir compte des accords existants sur le statut des forces.

 Ces accords servent à déterminer quel est l'État compétent pour enquêter sur des crimes commis par des forces armées stationnées hors de leur pays d'origine et en poursuivre les auteurs ; ils ne peuvent être invoqués pour permettre aux ressortissants d'un État d'échapper à la justice internationale.

 * En ce qui concerne les ressortissants des États-Unis qui ne seraient pas remis à la CPI, les accords d'impunité ne contiennent aucune garantie qu'ils seront jugés aux États-Unis ou ailleurs. Dans certains cas, il serait même impossible de les traduire devant un tribunal américain, car le Code pénal des États-Unis ignore bon nombre de crimes que reconnaissent le droit international et le Statut de Rome. Les juristes de l'Union européenne ont aussi analysé ces accords et sont arrivés à la même conclusion : «[...] la signature avec les États-Unis d'accords – sous leur forme actuelle – serait contraire aux obligations des États parties à la CPI au regard du Statut et pourrait être incompatible avec d'autres accords internationaux auxquels ces États sont parties». 

L'Union européenne a d'autre part publié des principes directeurs analysés par Amnesty International dans le document intitulé Cour pénale internationale. L'Union européenne doit prendre des mesures plus efficaces afin d'empêcher ses membres de conclure des accords d'impunité avec les Etats-Unis (index AI : IOR 40/030/02), publié en octobre 2002 et disponible à l'adresse suivante : http://web.amnesty.org/library/index/fraIOR400302002

Un État qui ratifierait un tel accord d'impunité renoncerait aussi à son droit souverain de choisir le tribunal compétent – un de ses propres tribunaux, un tribunal d'un pays ayant déposé une demande d'extradition ou la CPI – pour juger les personnes appréhendées sur son territoire et accusées de crimes, y compris de crimes commis sur ledit territoire. 

Si les États-Unis décident par exemple de ne pas ouvrir d'enquête ou de procédure contre un accusé, l'État qui aurait remis cette personne aux autorités américaines n'aurait aucun moyen de contraindre l'accusé à revenir sur son territoire aux fins d'enquête et de procédure devant ses propres tribunaux ou devant les tribunaux d'un autre pays, ou afin de le remettre à la CPI. D'autre part, tout État qui ratifierait un tel accord devrait renégocier les traités d'extradition existants avant que l'accord soit effectif ; il s'agit là d'une entreprise de longue haleine et qui risque d'être bien inutile, car de nombreux États ont déjà fait savoir qu'ils s'opposeraient à de telles renégociations. 

Je voudrais aussi vous faire remarquer qu'à notre connaissance les États-Unis n'ont pris aucune mesure de rétorsion contre les États qui ont refusé de signer de tels accords. La Loi relative à la protection du personnel des forces armées américaines qui autorise le retrait de l'aide militaire donne aussi au président le pouvoir de bloquer la procédure quand l'«intérêt national» est en jeu. Le gouvernement américain n'est donc nullement obligé de mettre un terme à son aide militaire si un accord d'impunité n'est pas signé.

 Nous espérons que vous refuserez l'accord proposé ou tout autre accord qui viserait à garantir l'impunité des personnes accusées de génocide, de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre. Nous espérons aussi que vous aurez à cœur de promouvoir l'adhésion du Rwanda au Statut de Rome de la Cour pénale internationale dans les meilleurs délais.

 Veuillez agréer, Monsieur le Député, l'assurance de ma haute considération.

 Martin Macpherson Directeur Droit international et Organisations internationales