Rwanda: Kofi Annan, l'africain qui a trahi les siens
(Iwacu1.com 08/05/2006)


Il n'a rien fait pour sauver les Rwandais parce que, dans sa tête, il était hors de question qu'il aille contre la volonté de ses maîtres cupides et racistes. On peut faire le même raisonnement au sujet de la Côte d'Ivoire.

Le 31 décembre 2006, sauf imprévu, Kofi Annan ne sera plus le secrétaire général de l'Organisation des nations unies (Onu) parce qu'il aura achevé son deuxième et dernier mandat. La question qui se pose ici n'est pas de savoir où il atterrira ni ce qu'il fera des années qu'il lui reste à vivre (ça ne regarde que lui et puis cela n'a aucun intérêt pour nous) mais si son départ sera regretté par les Africains et si Rwandais, Sierra Léonais, Soudanais, Congolais (RDC), Libériens et Ivoiriens songeront à décorer le successeur de Boutros Boutros-Ghali.

Personnellement, j'en doute fort car j'ai du mal à trouver ce que l'homme a apporté de beau, de grand et de bon au continent africain pendant les 10 années passées à la tête de l'Onu. C'est avec sa complicité, au contraire, que certains pays africains ont été humiliés et martyrisés. Qui ne se souvient en effet de sa passivité lors du génocide rwandais qui fit entre 800 000 et un million de morts en1994 ? Et pourtant, il occupait les fonctions de secrétaire adjoint aux opérations de maintien de la paix au sein de l'Onu. Il disposait alors d'environ 70 000 militaires et civils originaires de 77 pays.

C'est dire qu'il avait les moyens d'empêcher le génocide ou d'y mettre fin. Mais, selon Roméo Dallaire qui commandait la Mission des nations unies au Rwanda (Minuar), seuls 2 000 hommes furent déployés alors qu'il en eût fallu 5 ou 6 000 pour arrêter les massacres perpétrés par les extrémistes hutus, les fameux Interhamwe (mot kinyarwanda qui signifie « ceux qui combattent ensemble »). Le général canadien ajoute que, au niveau du Conseil de sécurité de l'Onu, la décision fut prise de retirer toute la Mission et d'abandonner à leur sort les 30 000 Rwandais qu'on avait réussi à sauver. Dans son bouleversant témoignage, J'ai serré la main du diable. La faillite de l'humanité au Rwanda (Libre _Expression, 2003, 685 p.), R. Dallaire avoue aussi qu'il était dépourvu d'équipements et de renseignements contrairement à la France, à la Belgique et aux Etats-Unis qui étaient restés en contact avec les dirigeants des deux parties belligérantes et qu'il n'avait pas été soutenu par ces troi s pays.

Il faudra attendre la commémoration du dixième anniversaire du génocide pour que Kofi Annan fasse son mea culpa. Ce sera devant l'Assemblée générale de l'Onu. Voici le discours qu'il fit à cette occasion : « Le génocide rwandais n'aurait jamais dû se produire. Mais il s'est produit La communauté internationale a abandonné le Rwanda à son sort et cela nous laissera pour toujours les plus amers regrets et la plus profonde tristesse. Si la communauté internationale avait réagi rapidement et avec détermination, elle aurait pu prévenir la plupart des massacres. Mais la volonté politique était absente, et les troupes aussi. J'étais moi-même à la tête du département des opérations de maintien de la paix de l'ONU et j'ai insisté auprès de dizaines de pays pour qu'ils fournissent des contingents militaires. Je pensais, à l'époque, faire de mon mieux, mais j'ai compris après le génocide que j'aurais pu, et dû, en faire plus pour donner l'alarme et rallier les bonnes volontés. Ce souven ir douloureux, comme celui de la Bosnie-Herzégovine, a beaucoup influé sur ma vision des choses et sur les décisions que j'ai prises en tant que Secrétaire général Que cette tragédie nous porte à essayer, ensemble, de nous traiter les uns les autres comme les membres d'une seule et même famille humaine ».

Des mots, rien que des mots. Et des mots creux, a-t-on envie de dire quand on voit sa gestion- partisane et calamiteuse- de la crise ivoirienne. J'y reviendrai. Pour l'instant, terminons avec le Rwanda en disant que les Rwandais ont été abandonnés d'abord parce qu'ils n'ont pas la peau blanche (la France et la Belgique n'ont évacué que leurs ressortissants), ensuite parce que leur pays est un pays qui ne compte pas aux yeux de ceux qui ont fait de l'argent une idole (un dieu) et qui sont dans la logique du « Tu n'as rien, tu n'es rien ; tu n'as pas de pétrole à nous donner, tu ne mérites pas notre compassion et notre assistance ». Kofi Annan n'a rien fait pour sauver les Rwandais parce que, dans sa tête, il était hors de question qu'il aille contre la volonté de ses maîtres cupides et racistes. On peut faire le même raisonnement au sujet de la Côte d'Ivoire.

Si le Ghanéen a accepté à Kléber (France) que des voyous deviennent ministres dans ce pays, s'il ne recule devant rien pour humilier et affaiblir chaque jour un président démocratiquement élu, s'il trouve normal que l'Assemblée nationale soit dissoute, s'il ferme les yeux sur les tueries et les casses de la BCEAO en zone rebelle, s'il n'a jamais interpellé Blaise Compaoré, Toumani Touré, Abdoulaye Wade, Omar Bongo et autres valets de la Françafrique qui déroulent le tapis rouge à des hors-la-loi, s'il soutient la concomitance du désarmement et de l'identification (ce que les accords de Pretoria ne disent pas), si Charles Blé Goudé et Eugène Djué sont sanctionnés par lui pour avoir défendu les institutions de leur pays, c'est parce que ceux qui l'ont fait roi veulent qu'il en soit ainsi. Tel est Kofi Annan : un Africain qui n'a pas d'autre ambition que de faire ce qui plaît à ses maîtres blancs.

Pour dire les choses autrement, cet homme n'a ni personnalité ni dignité comme ces nègres qui ne valent rien et ne savent rien mais doivent leur titre de supérieurs ou de provinciaux dans les congrégations religieuses uniquement à leur capacité à obéir servilement au Blanc et à travailler contre les intérêts de l'Afrique. Si Annan est sorti de l'ombre en 1997 pour occuper le prestigieux poste de secrétaire général, ce n'est pas parce qu'il était une lumière mais parce qu'il était le plus docile des Africains exerçant à l'Onu. Blaise-Pascal Talla le résume bien lorsqu'il écrit : « Kofi Annan ne doit certainement pas ses fonctions à ses compétences particulières ou à son intelligence. Il a été choisi parce que l'Occident cherchait désespérément un Africain- un Noir de préférence- dont il pouvait s'accommoder. C'était un bureaucrate passable, comme l'Onu en a produit beaucoup depuis sa création C'était un simple carriériste soucieux de faire plaisir à ses supérieurs hiérarchique s » (Journal de l'Afrique en Expansion, n. 369, mars 2006, p. 50).

Au total, que Kofi Annan vive dans l'illusion qu'il n'est pas n'importe qui pour avoir dirigé l'Onu ou bien parce qu'il est dans les bonnes grâces d'un Jacques Chirac de plus en plus vomi et honni est son droit. Quant à nous, nous ne le reconnaissons point comme un digne fils de l'Afrique car nous avons compris qu'il ne fait pas le poids devant son prédécesseur, l'Egyptien Boutros Boutros-Ghali (qui fut injustement privé d'un second mandat en raison de son indépendance d'esprit), et qu'il fait incontestablement partie de « cette génération de diplômés africains ayant choisi de trahir leur continent pour mener une médiocre carrière personnelle » (B.-P. Talla, art. déjà cité). Quand cet homme médiocre et docile quittera New York, l'Afrique sera-t-elle dans la tristesse ? Si Kwame Nkrumah vivait encore, il répondrait non, mille fois non !
OPINION
4 Mai 2006

Jean-Claude DJEREKE

Fraternité Matin (Abidjan)

© Copyright Iwacu1.com