La vérité sur les raisons de l’hostilité du Général Paul Kagame à l’encontre de M. Paul Rusesabagina

 

Dans son discours du 1er février 2006, journée baptisée «  Journée nationale des héros » le Général Paul Kagame, actuel président du Rwanda, a lancé des attaques en règle contre M. Paul Rusesabagina qui a sauvé des centaines de Rwandais en 1994 et dont l’histoire a été portée à l’écran dans le film « Hôtel Rwanda ».

Visiblement irrité par la notoriété de M. Paul Rusesabagina, le Général Paul Kagame a déclaré devant une foule réunie au stade national Amahoro: « les héros du Rwanda ne sont pas fabriqués en Amérique, en Europe ou en Asie. Les stars de cinéma ou de films n’ont pas leur place sur la liste des héros nationaux. L’histoire du Rwanda doit être déterminée par les Rwandais et non par des étrangers ».

Dans la même optique, les organisations proches du régime du Général Kagame font du zèle et ne lésinent sur aucun moyen dans leur campagne de diffamation et de dénigrement à l’encontre M. Rusesabagina, comme le montre l’article intitulé « Paul Rusesabagina : le héros ou l’imposteur ? » publié le 9 janvier 2006 par M. Jean Kamanzi au nom du Réseau Mondial des Rwandais de la Diaspora -Section Canada sur le site « Observatoire de l’Afrique Centrale » et paru en kinyarwanda dans l’hebdomadaire gouvernemental « Imvaho nshya »  no. 1637.

Comment expliquer cette attitude du Général  Kagame qui, d’une part se présente comme celui qui a arrêté le génocide de 1994 et qui, d’autre part, manifeste de l’hostilité à l’encontre d’un homme qui a sauvé des centaines de personnes pendant ce même génocide?  Ne devrait-on pas plutôt s’attendre à le voir honorer M. Rusesabagina étant donné que les actions que ce dernier a accomplies concordent avec ce qu’il prétend avoir été son objectif, à  savoir : sauver les personnes menacées d’extermination?

Cette question peut rester longtemps énigmatique si l’on cherche à y répondre en prenant comme prémisse le tissu de mensonges dans lequel s’est drapé le Général Kagame en présentant sa conquête du Rwanda comme une guerre pour arrêter le génocide. C’est uniquement en se dégageant de ce carcan de désinformation et en analysant lucidement les faits que l’on arrive à une conclusion qui rend l’attitude de Kagame parfaitement cohérente : le Général Kagame n’a jamais eu l’objectif de sauver les Tutsi du génocide, bien au contraire, son objectif a été de s’appuyer là-dessus pour prendre le pouvoir. Il n’a donc aucune considération particulière à l’égard de ceux qui ont failli perdre leurs vies en se portant au secours des victimes de l’innommable  tragédie qu’il a lui-même déclenchée et qui lui font ombrage au fur et à mesure que sa stratégie machiavélique est dévoilée.

Ce constat est établi grâce à des publications et des témoignages qui sont de plus en plus nombreux, non seulement à montrer que l’une des stratégies de guerre du Général Kagame a été l’incitation à l’extermination des Tutsi, mais aussi à faire état de massacres de Tutsi et d’autres populations civiles qu’il a lui même exécutés.

L’un des livres qui dévoile le vrai visage du Général Kagame et sa stratégie machiavélique pour prendre le pouvoir à Kigali est celui de M. Abdul Joshua Ruzibiza « Rwanda, l’histoire secrète ». Dans ce livre, M. Ruzibiza qui est lui-même Tutsi et ancien compagnon d’armes du Général Kagame affirme, preuves à l’appui, que la stratégie de Kagame était de « créer le désordre afin de montrer l’impuissance de l’État et donner au FPR des arguments pour s’emparer du pouvoir par la force. Il fallait inciter les milices du MRND et de la CDR à tuer des Tutsi afin que le FPR puisse relancer les combats » (p.209). 

Parmi les faits qu’il présente pour prouver cette grave accusation à l’encontre de celui qui prétend être le sauveur des Tutsi figure la planification et l’exécution de l’attentat terroriste contre l’avion du président Habyarimana qui constitue l’élément déclencheur du génocide. M. Ruzibiza, qui a lui-même fait parti du « Network commando » qui a abattu l’avion le 6 avril 1994, affirme que le 31 mars 1994, « une réunion s’est tenue à Mulindi, dirigée par le Général-major Paul Kagame…..La décision a été prise qu’à toute heure, dès que l’opportunité se présente, l’avion du président Habyarimana serait abattu » (p.232) .  Le Général Kagame savait parfaitement l’effet dévastateur sur les populations tutsi qu’allait provoquer cet attentat parce que, comme le souligne M. Ruzibiza, il avait d’abord pris le soin de « chauffer les esprits» au moyen de la pose de bombes qui explosaient un peu partout dans le pays.

En plus des preuves qui montrent que la stratégie de Kagame était de provoquer le génocide et de s’en servir pour prendre le pouvoir, M. Ruzibiza fait état des crimes que Kagame a lui même commis, non seulement à l’encontre des civils Hutu, mais aussi des populations tutsi. Ainsi, il révèle entre autres que des populations Hima-tutsi du Mutara ont été massacrées parce qu’elles n’acceptaient pas que leur bétail soit pillé et consommé gratuitement par les troupes du Général Kagame. Il affirme aussi que le 12 mai 1994 à Muhura, le Général Kagame a ordonné que la population civile en fuite soit rassemblée et qu’il est  «  monté lui-même dans sa jeep et a mitraillé la population rassemblée au canon 12.7 machine gun antiaérien» (p.294) tuant plus de 800 personnes. Pour camoufler ses forfaits, le Général Kagame brûlait les cadavres de ses victimes ou les mettait dans des fosses communes pour les exhiber par la suite et les présenter comme des victimes Tutsi ayant été massacrées par les ex-Forces Armées rwandaises et les miliciens Interahamwe.

Les révélations de M. Ruzibiza concordent avec celles de beaucoup d’autres sources. Ainsi, l’enquête du juge antiterroriste Jean-Louis Bruguière a établi que le Général Kagame est l’auteur de l’attentat qui a déclenché le génocide. De même, dans son livre « Rwanda : du parti – État à l’État garnison », M. James Gasana fait lui aussi état de massacres de populations civiles, y compris de Tutsi, perpétrés par le Général Kagame dans sa course vers le pouvoir. Il cite notamment  le témoignage de M. Joseph Matata du Centre de la lutte contre l’impunité au Rwanda selon lequel les soldats du Front Patriotique Rwandais (FPR) ont reçu l’ordre de tuer non seulement les malades mentaux du centre psychiatrique de Ndera, mais aussi « d’anéantir tous les rescapés sous prétexte que les personnes saines avaient péri dans les premiers massacres  » (p.272). Même les personnes que M. Rusesabagina avaient pu sauver des mains des miliciens à l’hôtel des Milles collines n’ont pas toutes échappé à ce triste sort. Dans la conférence qu’il a donné à Montréal le 22 octobre 2005 sous l’invitation de l’association Amitiés Canada-Rwanda et pendant laquelle il a été longtemps ovationné par beaucoup de Canadiens et de Rwandais présents, M. Rusesabagina a indiqué que certains rescapés qu’il avait pu protéger n’ont jamais été revus par leurs familles depuis le moment où ils ont été évacués dans la zone qui était contrôlée par le Général Kagame. Ils ont été convoqués à de pseudo réunions, nous a-t-il dit, et l’on se demande si celles-ci sont encore en cours, plus de dix ans après!

Le Général Kagame ne s’est pas seulement limité à l’incitation au génocide et à l’extermination de populations civiles, toutes ethnies confondues, mais il a aussi bloqué tous les  secours qui pouvaient être apportés aux personnes menacées d’extermination jusqu'à ce qu’il ait été sûr que la voie était complètement libre pour sa prise du pouvoir. À ce sujet, M. Ruzibiza, qui a perdu toute sa famille à cause de cette obsession du Général Kagame de s’accaparer du pouvoir, s’exprime en ces termes : « Je suis convaincu que nous (les militaires de l’APR) avions la capacité et la volonté de sauver beaucoup de Tutsi que nous l’avons fait, mais la clique placée à la tête du FPR a tout fait pour ne pas nous permettre de les secourir » (p.347). Dans son livre « J’ai serré la main du diable, la faillite de l’humanité au Rwanda », le Général Roméo Dallaire, qui commandait les casques bleus de la mission des Nations Unis au Rwanda au moment du génocide, abonde dans le même sens en déclarant que, lorsqu’il a évoqué la possibilité de renforcer les troupes dans le but d’arrêter les massacres, le Général Kagame s’y est catégoriquement opposé et a répondu : «  Nous combattrons toute armée d’intervention qui viendra au Rwanda » (p. 432).

En comparant le comportement  de M. Paul Rusesabagina que plusieurs appellent « le Schindler rwandais » et celui, ci-haut dévoilé, du Général Paul Kagame pendant le génocide rwandais de 1994, l’on comprend mieux l’origine de l’hostilité que le second entretient contre le premier : les deux « Paul » sont diamétralement opposés comme le pôle nord et le pôle sud. Pendant que M. Paul Rusesabagina s’évertuait à sauver des vies humaines au risque de perdre la sienne, le Général Paul Kagame s’acharnait à massacrer des populations civiles et à inciter au génocide pour assouvir sa soif du pouvoir. Cette dichotomie prévaut même actuellement car, pendant que M. Paul Rusesabagina fait des conférences sur des pistes de réconciliation des Rwandais, le Général Paul Kagame tient des discours haineux qui sont toujours suivis d’assassinats et d’autres violations des droits de la personne. À titre illustratif, il y a lieu de citer son discours du 31 mars 2003 à Bwisige au nord du Rwanda au cours duquel il avait promis de « blesser » et de « broyer » ses opposants et qui, moins d’un mois après, a été suivi par la disparition  du Lieutenant-colonel Augustin Cyiza, enlevé à Kigali le 23 avril 2003.

La campagne de diffamation et de dénigrement qui a précédé l’assassinat  du Lieutenant-colonel Cyiza ressemble beaucoup à celle menée actuellement contre M. Paul Rusesabagina. Comme l’indiquent les témoignages contenus dans le livre « Augustin Cyiza, un homme libre au Rwanda », pour préparer l’assassinat de cet homme qui avait pourtant sauvé beaucoup de personnes à Cyangugu pendant le génocide de 1994, les médias gouvernementaux ont prétendu qu’il voulait renverser le régime de Kigali et les idéologues du FPR l’ont chargé de toutes les infamies pour finir par le ranger dans la catégorie dite de « negative forces ».

C’est cette même stratégie qui est utilisée contre M. Paul Rusesabagina depuis le virulent discours ci-haut mentionné que le Général Paul Kagame a prononcé le 1er février 2006.  En effet, le 5 février 2006, soit moins d’une semaine après ce discours, une radio appelée « Radio Contact » proche du gouvernement de Kigali a organisé un débat visant à dénigrer M. Paul Rusesabagina. Des intervenants dont certains n’avaient jamais mis les pieds à l’Hôtel des Mille collines pendant le génocide de 1994 ont livré de faux témoignages sur M. Paul Rusesabagina en prétendant qu’il n’aurait pas protégé tous ceux qui étaient à l’Hôtel des Mille collines. Ils n’ont pourtant pas été capables de citer une seule personne qui y aurait été tuée.

Selon des sources bien informées, le Général Paul Kagame aurait déjà mis sur pied une équipe de faux témoins devant être prochainement envoyée en Amérique du Nord et en Europe pour y continuer cette campagne de diffamation contre M. Rusesabagina. De même, selon ces sources, de fausses factures prétendument données par M. Rusesabagina aux réfugiés de l’Hôtel des Mille collines et un faux journal haineux qui aurait été mis sur pied par M. Rusesabagina en 1994 seraient entrain d’être confectionnés sous la supervision de M. Antoine Mugesera. Rappelons que c’est ce même Antoine Mugesera qui a été à l’origine de l’arrestation du père belge Guy Theunis, récent récipiendaire du Prix de la Paix Kerk en Leven, sous de fausses accusations d’incitation à la haine et au génocide. La création à Ottawa au Canada du Réseau Mondial des Rwandais de la Diaspora dirigé par M. Jean Kamanzi s’inscrirait dans la même stratégie. Notez que c’est ce même Kamanzi qui, le 23 janvier 1995, a déclaré à l’émission le Point de la télévision de Radio Canada que Mgr Georges Henri Lévesque, fondateur de l’Université nationale du Rwanda, avait chassé les Tutsi de cette université en 1973 alors qu’il avait quitté le Rwanda en 1971.

Compte tenu de tous ces moyens déployés à son encontre, il est sans nul doute que M. Paul Rusesabagina est déjà sur la liste des prochaines victimes du Général Paul Kagame.

Acceptera-t-on alors, que le Général Paul Kagame exporte son terrorisme en Amérique du Nord et en Europe? Le Canada et d’autres pays occidentaux devraient-ils tolérer sur leurs territoires des réseaux qui relaient la propagande haineuse du Général Paul Kagame à l’encontre de personnes innocentes et le renforcent ainsi dans sa stratégie de chasse à l’homme ?

Il est urgent que la communauté internationale prenne des mesures concrètes à l’encontre du dictateur rwandais Paul Kagame et de ses réseaux disséminés à travers la planète pour que demain l’on ne dise pas encore ‘’ On aurait donc dû’’.

Les pays qui veulent réellement que le Rwanda devienne un État de droit ne devraient plus accorder des visas aux membres du gouvernement rwandais ainsi qu’à leurs familles et devraient bloquer leurs comptes à l’étranger jusqu’à ce qu’ils cessent de pourchasser leurs opposants réels ou supposés, comme c’est le cas pour les dirigeants de certains autres pays africains.

Il est aussi grand temps que le Tribunal Pénal International sur le Rwanda s’engage résolument dans une voie qui favorise la réconciliation entre les rwandais en poursuivant tous les grands responsables des crimes de génocide et des crimes contre l’humanité qui ont été commis en 1994,  sans distinction d’ethnie ni d’allégeance politique.

 

Montréal, mars 2006

 

Emmanuel Hakizimana, Ph.D.